Première décision de justice condamnant un diagnostiqueur pour un diagnostic de performance énergétique erroné : vers une prochaine mise en cause de la responsabilité des promoteurs ?
Note de Mmes Marie-Christine PEYROUX et Véronique LAGARDE :
La décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de Paris montre que la responsabilité du diagnostiqueur a été retenue sur le fondement de sa responsabilité civile professionnelle. Le diagnostiqueur avait commis des « erreurs grossières » qui ont justifié la mise en jeu de sa responsabilité afin de réparer la perte de chance de l’acquéreur « d’avoir pu négocier à la baisse le prix d’acquisition du bien ou d’avoir pu renoncer à cette acquisition si le prix lui avait paru trop élevé« .
Cette jurisprudence ouvre certainement la voie vers une recherche de la responsabilité des diagnostiqueurs, et probablement des professionnels, qui délivreront à l’avenir les attestations de prise en compte de la réglementation thermique prévues par les articles L. 111-9-1 et R. 111-20-1 à R. 111-20-4 du Code de la construction et de l’habitation en application de la loi Grenelle II.
Cependant, plusieurs arguments techniques viennent limiter de prime abord le risque d’extension de cette jurisprudence à la responsabilité des constructeurs.
En premier lieu, la responsabilité des constructeurs relève du régime spécial des articles 1792 et suivants du Code civil qui instaure une responsabilité spécifique s’agissant des dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui le rende impropre à sa destination. Une action à l’encontre d’un promoteur devra donc s’inscrire dans ce cadre juridique spécifique.
Ensuite, la réglementation thermique et ses labels de haute performance reposent sur un calcul théorique exclusif du comportement de l’utilisateur. En d’autres termes, ni le label BBC, ni la RT 2012 n’ont vocation à estimer la consommation énergétique réelle de l’immeuble, ce qui est l’objet du diagnostic de performance énergétique, ni encore moins à la garantir.
Mais, malgré ces différences techniques, la tendance de fond des décisions de jurisprudence semble évoluer en faveur des acquéreurs non professionnels qui ne bénéficieraient pas des avantages attendus du bien acquis et, dans le cas des immeubles BBC, des économies d’énergies potentielles, largement mises en avant dans la documentation commerciale des promoteurs.
Dans un arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2000, les juges ont estimé que « l’immeuble était rendu impropre à sa destination par le non fonctionnement de l’élément d’équipement constitué par les capteurs solaires, […] et parce que les objectifs d’économies d’énergie, consécutifs à la fourniture d’énergie mixte, promis aux utilisateurs par le promoteur, qui s’était prévalu de la qualification solaire trois étoiles, n’étaient pas atteints« . La Cour de cassation a donc intégré dans la destination du bien l’attente de l’acquéreur par rapport aux économies d’énergies promises.
La nouvelle attestation de prise en compte de la réglementation thermique qui sera délivrée dans le cadre des constructions soumises à la RT 2012, en application du décret du 18 mai 2011, ne devrait pas exonérer les constructeurs de ce risque, puisque la jurisprudence admet que des désordres puissent relever de la garantie décennale malgré le respect de la réglementation applicable (par ex. en matière phonique : Cass Plén. 27 oct. 2006 – Cass. civ. 3e 30 nov. 2010).