L’arrêté par lequel le maire refuse de faire droit à la demande de permis de construire peut être suspendu par ordonnance si les conditions d’urgence et de doute sérieux quant à la légalité de la décision sont réunies.
Note de M. BENOIT-CATIN :
La possibilité, depuis le 1er janvier 2001, d’obtenir la suspension juridictionnelle d’une décision administrative de rejet est suffisamment novatrice pour que l’on s’arrête sur l’une des premières décisions ordonnant la suspension d’un refus de permis de construire. Jusqu’à son abandon quelques jours seulement avant l’entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, la jurisprudence n’accueillait en effet la requête en sursis contre une décision négative que si celle-ci était de nature à modifier par elle-même la situation de droit ou de fait de l’intéressé (CE, Ass. 23 janvier 1970, solution abandonnée avec CE, sect., 20 décembre 2000).
Elle est d’autant plus novatrice que la suspension ne nécessite plus la justification d’un préjudice difficilement réparable mais celle d’une situation d’urgence, que la doctrine analyse en général comme une condition plus souple.
En l’espèce, la société requérante était liée, par une promesse synallagmatique de vente conditionnelle, avec le propriétaire d’un terrain sur lequel elle avait déposé une demande de permis de construire, refusé par arrêté du 2 août 2001, et effectué des travaux de sondage.
Saisi sur le fondement de l’article L.521-1 du Code de justice administrative, le juge des référés du Tribunal administratif de Poitiers a ordonné la suspension de l’arrêté de refus, en caractérisant l’urgence dans les termes suivants :
« Considérant, d’une part, qu’eu égard à la circonstance que le compromis de vente en vertu duquel la société dispose d’un titre l’habilitant à présenter la demande de permis de construire est soumis à un certain nombre de conditions suspensives dont l’une est celle d’une réitération du contrat par acte authentique avant le 30 octobre 2001, l’EURL, qui serait alors exposée à la perte irrémédiable des frais d’étude du projet et de sondage du terrain qu’elle a exposés, justifie que la décision dont elle demande la suspension préjudicie de façon suffisamment grave et immédiate à ses intérêts ; qu’ainsi, la condition d’urgence à laquelle l’article L.521-1 du Code de Justice administrative subordonne la suspension d’une décision administrative par le juge des référés doit être regardée, dans les circonstances de l’espèce, comme satisfaite. »
On relèvera que le juge n’a pas fait droit à la demande de faire injonction à la commune de procéder au retrait du refus de permis de construire. Le retrait emporte en effet disparition rétroactive du permis de construire au même titre qu’une annulation juridictionnelle et ne peut donc s’analyser comme une mesure provisoire, seule mesure autorisée au juge des référés par l’article L.511-1 du Code de justice administrative. De plus ordonner le retrait aboutirait indirectement à préjudicier au principal. En revanche, il a été enjoint au maire de statuer de nouveau sur la demande de permis de construire dans un délai compatible avec celui prévu pour la réitération de la vente (en l’espèce un mois).