T.A. PARIS 15 Février 2008

Le doublement de la redevance pour création de bureaux est soumis à la procédure contradictoire prévue à l’article L. 80 D du Livre des Procédures Fiscales.

Le 27 mars 2002, la société X a déposé une demande de permis de construire en vue du changement de destination d’un bâtiment de sept étages à usage d’activité et d’habitation en bureaux situé à Paris.

Il s’agissait probablement d’une demande visant à régulariser une situation existante, comme en témoignent les termes du certificat administratif délivré par le préfet de Paris le 9 juillet 2001, qui indiquent que « l’affectation à usage commercial des locaux, objet de la demande, est régulière au regard de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation, à l’exception de 5 et 17 pièces recensées à usage d’habitation dans les bâtiments sur rue et sur cour« .

Par lettre du 6 août 2001, le préfet invite la société X à déposer une demande de dérogation, assortie d’une proposition de compensation, dans le délai de deux mois.

Cette obligation est de nouveau rappelée à la société requérante, au cours de l’instruction de sa demande de permis, par lettre du 7 février 2003.

La société X n’a pas obtenu la dérogation en cause et sa demande de permis de construire est rejetée le 19 juin 2002.

Le 19 juin 2003, un procès-verbal d’infraction constate que des travaux ont été effectués sans autorisation administrative, notamment la transformation en bureaux de locaux d’habitation situés à plusieurs étages de l’immeuble.

Ce procès-verbal est notifié à la société X par lettre du 17 juillet 2003, dans laquelle il est indiqué qu’il va être procédé à la taxation d’office, assortie de pénalités, des surfaces de bureaux non autorisées et assujetties à la redevance pour création de bureaux en application de l’article R. 520-10 du Code de l’urbanisme.

Le 5 août 2003, la redevance est fixée à la somme de 355.630 euros, pour une surface utile de 2.915 m².

Par lettre du 9 octobre 2003, la société X conteste le montant qui lui est ainsi réclamé et fait parvenir aux services du domaine, chargés du recouvrement, un chèque de 177.815 euros, correspondant à la redevance qui aurait été due sans majoration du taux. Sa demande de décharge de la différence est rejetée le 20 octobre 2003.

La société X dépose une requête dirigée contre le titre de perception, en tant qu’il fixe le montant de la redevance sur les bureaux au double de la redevance normalement due.

Selon le Tribunal Administratif de Paris :

« Considérant qu’aux termes du second alinéa de l’article L. 80 D du Livre des Procédures Fiscales : « les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l’expiration d’un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l’Administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu’elle se propose d’appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l’intéressé de présenter dans ce délai ses observations » ;

Considérant que la majoration de la redevance pour création de bureaux à un taux double de la redevance éludée en application de l’article R. 520-10 du Code de l’urbanisme, en cas de travaux réalisés en l’absence de délivrance de permis de construire, dès lors qu’elle présente le caractère d’une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu’elle vise et n’a pas pour objet la seule réparation pécuniaire d’un préjudice, doit être regardée comme étant au nombre des sanctions fiscales auxquelles s’appliquent les dispositions précitées de l’article L. 80 D du Livre des procédures fiscales ;

Considérant en l’espèce que, si la société X a été informée, dès le 17 juillet 2003, de ce qu’elle serait assujettie à une taxation d’office assortie de pénalités, il ressort des pièces du dossier qu’elle n’a pas bénéficié de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l’article L. 80 D du Livre de Procédures Fiscales, dès lors que le maire de Paris n’a ni attendu l’écoulement d’un délai de 30 jours pour notifier la décision d’assujettissement, ni indiqué à la société requérante qu’elle disposait d’un délai de 30 jours pour formuler ses observations ;

Qu’eu égard au caractère irrégulier de la procédure, la société est fondée à demander la décharge de la somme de 177.815 euros à laquelle elle a été assujettie à titre de pénalité en application de l’article R. 520-10 du Code de l’urbanisme ».

Source : JCP éd. Adm. et coll. terr., 24/08, 2149