La vente de trois lots issus d’un ensemble immobilier composé de huit lots en volumes ne saurait être considérée comme équivalant à la vente d’un terrain viabilisé lui permettant d’être assimilée à la vente d’un terrain à bâtir et doit être regardée comme consistant en la vente d’un immeuble dont la construction est inachevée.
Note de M. Bernard STEMMER :
La question posée au juge administratif était la suivante :
Un opérateur foncier met en place un ensemble immobilier divisé en lots de volumes : volumes de parking publics et privés en sous-sol, place publique, volumes de commerces et habitation en élévation. L’état de division décrit donc des lots de volume immobilier définis en trois dimensions et superposés, appuyés, accolés les uns aux autres, avec le réseau de servitudes impliqué par cette situation : servitudes d’appui, d’ancrage, de ruissellement … servitudes de passage des gaines et des ascenseurs desservant plusieurs volumes, etc.
Ce montage, bien qu’original, est largement aujourd’hui utilisé et tout à fait maîtrisé au plan technique.
L’opérateur, titulaire au départ d’un permis de construire unique, envisage de construire lui-même certains de ces volumes (sous-sols de parkings) et cède « à construire » les autres volumes. Au moment de cette vente, les lots de volume en sous-sol ne sont pas encore édifiés.
Les lots de volume cédés sont définis en trois dimensions et il est précisé dans l’état de division : « la propriété du volume global ci-dessus emporte le droit de réaliser à l’intérieur dudit volume toutes constructions, et comporte la propriété desdites constructions après leur réalisation, et le droit de procéder à toute subdivision de ladite propriété ».
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La question posée au juge de l’impôt était celle du taux de la TVA applicable à la vente de ces volumes en superstructure, sachant qu’à l’époque la TVA était due au taux de 13,02 % sur les ventes de terrains à bâtir, et à 18,6 % sur les ventes (notamment) d’immeubles inachevés.
Lors du contrôle fiscal ayant abouti au contentieux administratif, le vérificateur fit valoir que la vente des volumes supérieurs était celle, non pas d’un terrain à bâtir, mais d’un immeuble inachevé, au motif que les travaux de « l’ensemble immobilier unique » étaient commencés.
L’opérateur soutenait au contraire que les volumes vendus étaient des espaces homogènes physiquement distincts et que, dans chacun l’acquéreur construisait avec ses propres entreprises, ses marchés, etc., comme maître d’ouvrage autonome, et qu’il ne pouvait donc pas être question de voir dans cette vente de « volume à construire » une vente d’immeuble inachevé.
L’Administration a persisté à voir dans cette vente celle d’une « dalle en béton » (même si elle n’était pas encore construite), et à soutenir que, s’agissant d’un « immeuble unique » parce que le permis était unique, cette vente de dalle en béton était celle d’un immeuble inachevé que l’acquéreur s’engageait à achever.
Les « lots de volume » d’un ensemble immobilier complexe sont des immeubles autonomes, « chacun constitue une propriété distincte et on doit reconnaître à son propriétaire le droit de construire ».
L’existence même des servitudes évoquées plus haut implique nécessairement que les volumes soient des immeubles distincts, tour à tour fonds servants et fonds dominants, et l’idée « d’opération unique » ou d’immeuble (unique) inachevé est incompatible avec cette pluralité d’immeubles, sièges de droits concurrents.
Qu’il y ait un seul permis de construire ou que chaque acheteur d’un lot obtienne son propre permis de construire, la réalité est la même : chaque lot de volume est « une assiette à bâtir », un espace autonome destiné à recevoir une construction, il est bien l’équivalent d’un terrain à bâtir quant à l’engagement de l’acheteur de construire sur cette assiette et dans cet espace.
Aujourd’hui, les taux de la TVA sont alignés, et la querelle perd de son actualité à cet égard. Mais le fait qu’elle ait pu avoir lieu montre que la nature d’un lot de volume immobilier n’est pas nécessairement conçue de la même façon par des titulaires d’intérêts différents.
Et la distinction conserve d’autres intérêts. Ainsi, par exemple, en est-il de la taxe foncière sur les propriétés non bâties … ou bâties ?
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Il en est encore ainsi du régime fiscal d’une société visée à l’article 239 ter du CGI. S’il s’agit de terrain à bâtir, la situation est claire. Si le lot de volume immobilier n’est qu’une partie d’un immeuble inachevé, toutes les hypothèses sont possibles : assimilation à des travaux « sur existants » ? (auquel cas les sociétés de l’espèce sont admises à conserver leur statut fiscal si les travaux qu’elles exécutent nécessitent un permis de construire et s’ils sont d’importance suffisante pour équivaloir à des travaux de construction neuve) – ou assimilation à un immeuble bâti et à sa revente après travaux (ce qui motive la déchéance fiscale de ces sociétés) ?
De même encore, l’option d’un marchand de biens entre le régime de la TVA immobilière et le régime de l’article 1115 du CGI n’est ouverte qu’en cas d’acquisition d’un terrain à bâtir, et nullement en cas d’acquisition d’un immeuble inachevé.