Les incidences d’une requalification
Le principe est relativement simple : le « faux modificatif » produira les mêmes effets qu’un nouveau permis de construire :
Retrait implicite du permis initialement délivré
Le Conseil d’Etat considère, d’une manière générale, qu’une même personne ne peut être titulaire de plusieurs permis sur un même terrain et que la délivrance d’un nouveau permis de construire a, en principe, pour effet de retirer, implicitement mais nécessairement, le précédent permis délivré sur la même unité foncière, quand bien même le projet faisant l’objet du second permis serait différent de celui autorisé par le premier (Conseil d’Etat, 31 mars 1999, « Vicqueneau et autres »). Cette jurisprudence doit d’autant plus inciter à la prudence qu’elle paraît aujourd’hui considérer ce retrait comme définitif : si le second permis fait l’objet d’un recours et s’il est annulé, son annulation ne fera pas revivre le permis initial.
Point de départ du délai de recours
Si cette substitution de permis intervient à la suite d’un recours contre le permis initial, le délai de recours contre le « faux modificatif » ne sera pas déclenché à l’égard des auteurs du recours par l’affichage du permis de mairie et sur le terrain. Il faudra en outre notifier aux requérants le permis délivré, en application du principe du contradictoire. A défaut, ces requérants pourraient agir sans délai à l’encontre du « faux modificatif », comme s’il s’agissait d’un nouveau permis (Conseil d’Etat, 28 juillet 1995, « Commune de Saint Maur des Fossés »).
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Appréciation de la légalité de l’ensemble du projet
Le constructeur perdra, avec une requalification en un nouveau permis, l’avantage de la jurisprudence relativement souple applicable aux permis modificatifs. Traditionnellement, un permis modificatif ne peut être critiqué au contentieux qu’à raison des seules modifications opérées et peut venir modifier un permis illégal si les modifications ne portent pas une atteinte supplémentaire aux règles d’urbanisme méconnues par le premier permis (cour administrative d’appel de Nancy, 31 décembre 1997, « Genin »). En cas de « faux modificatif », le permis pourra ainsi être critiqué en toutes ses dispositions, quand bien même certaines auraient déjà été autorisées, et la légalité de l’ensemble du projet sera appréciée, par le juge, en fonction des règles d’urbanisme applicables à la date de la signature du permis.
Fiscalité immobilière défavorable
Le constructeur peut également se trouver soumis à une fiscalité immobilière plus défavorable. En droit, en effet, un permis modificatif n’est, en principe, le fait générateur de taxes et participations qu’en cas d’augmentation des surfaces construites, et proportionnellement à ces modifications. La requalification en nouveau permis amènera l’administration fiscale, ou le maire, à considérer ce permis comme le fait générateur de nouvelles contributions devant être calculées sur l’ensemble des surfaces hors œuvres autorisées et en fonction des règles opposables à la date du « faux modificatif ». Et celles-ci peuvent alors être moins favorables que celles en vigueur à la date de la délivrance du permis initial.
Il est souvent avancé que les constructeurs disposant d’un permis modifié pourraient finalement choisir de mettre en œuvre le permis initial, sans tenir compte des modificationsautorisées. En des termes peut-être maladroits, la cour administrative d’appel de PARIS (« SCI Les Ormes », 2 juillet 1996) n’a pas suivi cette voie et a expressément considéré que le constructeur ne peut mettre en œuvre que le projet modifié. Cette jurisprudence paraît justifiée.