ORDONNANCE n° 2013-638 du 18 Juillet 2013

L’ordonnance du 18 juillet 2013 vise à limiter les contestations abusives contre les permis de construire, de démolir ou d’aménager et à accélérer le traitement de ces contentieux.

Elle est entrée en vigueur le 19 août 2013.

Note de M. Jean-Marc PASTOR :

Une définition plus stricte de l’intérêt à agir

Pour lutter contre l’effet paralysant des recours abusifs, un article L. 600-1-2 est inséré dans le Code de l’urbanisme.

Il vise, tout en respectant le droit au recours, à mieux définir l’intérêt à agir des personnes physiques ou morales autres que l’Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements, et les associations.

Une personne ne sera désormais recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager « que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du Code de la construction et de l’habitation [vente d’immeubles à construire] ».

Un article L. 600-1-3, nouveau également, prévoit que l’intérêt à agir contre un permis s’apprécie à la date d’affichage en mairie de la demande d’autorisation, dont les modalités sont définies à l’article R. 423-6 du Code de l’urbanisme.

Cette disposition, qui existe déjà pour les associations (art. L. 600-1-1 C. urb.), a pour objectif de lutter contre les recours « abusifs » de requérants qui se constituent artificiellement un intérêt pour agir après le dépôt de la demande.

Néanmoins, pour ménager le droit au recours d’un demandeur de bonne foi, un tempérament est prévu lorsque le requérant est en mesure de justifier « de circonstances exceptionnelles« .

Régularisation du permis : les pouvoirs du juge étendus

L’ordonnance réécrit l’article L. 600-5 du Code de l’urbanisme relatif à la possibilité d’annulation partielle et de régularisation d’une autorisation de construire, de démolir ou d’aménager, pour permettre la régularisation du projet dès le jugement de première instance et pour donner au juge la possibilité de fixer un délai pour que le titulaire demande cette régularisation.

Le juge pourra même, s’il l’estime nécessaire, assortir sa décision d’un délai pour que le pétitionnaire dépose une demande d’autorisation modificative afin de régulariser le permis partiellement annulé.

Un nouvel article L. 600-5-1 autorise le juge à surseoir à statuer sur l’annulation d’un permis, lorsqu’il constate que la régularisation est possible par un permis modificatif.

Lorsque le recours sera qualifié d’abusif, c’est-à-dire excédant la défense des intérêts légitimes du requérant et causant un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, le juge administratif pourra condamner l’auteur du recours à payer des dommages et intérêts au pétitionnaire.

Il ne sera ainsi plus nécessaire à ce dernier de saisir le juge civil pour demander une indemnisation : il pourra le faire, par mémoire distinct, devant le juge administratif.

De telles conclusions pourront être présentées pour la première fois en appel.

L’enregistrement des procédures transactionnelles

Visant spécifiquement les recours « mafieux » donnant lieu à des transactions occultes, l’ordonnance prévoit, enfin, que toute transaction par laquelle un requérant se désiste d’un contentieux en contrepartie d’une somme d’argent ou d’un avantage en nature devra être enregistrée auprès de l’administration fiscale (v. art. 635 CGI).

Une transaction non enregistrée sera réputée sans cause et les sommes versées ou celles correspondant au montant des avantages consentis seront sujettes à répétition si elles sont découvertes.

L’action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l’obtention de l’avantage en nature. Elle peut être exercée par les acquéreurs des constructions.

Source : AJDA, 27/13, page 1540