Nouvel article L.111-5-3 du Code de l’Urbanisme

ARTICLE 14 – Protection de l’acquéreur de terrain
Après l’article L.111-5-2 du Code de l’urbanisme, il est inséré un article L.111-5-3 ainsi rédigé :

« Art. L.111-5-3. – Toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un terrain indiquant l’intention de l’acquéreur de construire un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel sur ce terrain mentionne si le descriptif dudit terrain résulte d’un bornage. Lorsque le terrain est un lot de lotissement, est issu d’une division effectuée à l’intérieur d’une zone d’aménagement concerté par la personne publique ou privée chargée de l’aménagement ou est issu d’un remembrement réalisé par une association foncière urbaine, la mention du descriptif du terrain résultant du bornage est inscrite dans la promesse ou le contrat.
Le bénéficiaire en cas de promesse de vente, le promettant en cas de promesse d’achat ou l’acquéreur du terrain peut intenter l’action en nullité sur le fondement de l’absence de l’une ou l’autre mention visée au premier alinéa selon le cas, avant l’expiration du délai d’un mois à compter de l’acte authentique constatant la réalisation de la vente. La signature de cet acte authentique comportant ladite mention entraîne la déchéance du droit à engager ou à poursuivre l’action en nullité de la promesse ou du contrat qui l’a précédé, fondée sur l’absence de cette mention. »

I – ANALYSE DE L’ARTICLE

1 – Vise les avants-contrats et les contrats de vente.

Les autres formes d’aliénation, à titre gratuit ou onéreux, ne sont pas concernées par le texte.

2 – Vise les « terrains » avec intention de construire un immeuble d’habitation ou mixte.

Le texte ne distingue pas entre :
– Acquéreurs professionnels ou non-professionnels,
– L’habitat collectif et l’habitat individuel,
– Les terrains nus et les terrains supportant une construction destinée à faire l’objet d’une extension à usage d’habitation.

3 – Opère une première distinction :

– En secteur « diffus » : l’avant-contrat (et le contrat) doit seulement indiquer si « le descriptif du terrain résulte d’un bornage ».
– En lotissement, en ZAC ou en AFUR : la mention d’un bornage est obligatoire.
…/… 

4 – Opère une seconde distinction :

– En lotissement : il semble que toutes les cessions (même les reventes) soient concernées et non pas seulement les ventes par le lotisseur.
– En ZAC : seule la vente par l’aménageur semble concernée.

5 – Fixe les sanctions : action en nullité dans le mois de la vente par acte authentique.

La mention figurant dans la vente « absout » l’absence de mention dans l’avant-contrat (procédure comparable à celle mise en place dans la Loi Carrez).

II – ANALYSE DES PROBLEMES D’APPLICATION

1 – Lotissements : si la règle concerne toutes les ventes au sein d’un lotissement, elle s’applique aux vente et reventes dans les lotissements autorisés avant la Loi SRU.
Mais il convient de prendre en compte un terme au-delà duquel l’obligation de bornage ne correspond plus à l’esprit de la loi.
Il convient de remarquer que l’article 14 de la loi SRU instituant le nouvel article L.111-5-3 du Code de l’Urbanisme est placé dans la section I du Titre I sur « les documents d’urbanisme et les opérations d’aménagement ».
On peut légitimement penser que le législateur a voulu indiquer l’obligation de bornage dans la procédure de lotissement au sens du Code de l’Urbanisme.
En vertu de l’article L.315-2-1 du Code de l’Urbanisme, le règlement du lotissement cesse de s’appliquer après dix ans (sauf exception).
On doit en déduire que, à l’expiration du délai de dix ans après l’autorisation de lotir, il n’y a plus de lotissement au sens réglementaire du terme (Cf. Rép. Min. N° 32751 : JOAN 8 nov. 1999 page 6478), même s’il existe encore sur le plan contractuel (cahier des charges, ASL…) et que le bornage n’est plus une obligation.

2 – De la différence de rédaction entre les deux premières phrases du premier alinéa, doit-on en déduire que, pour les lotissements et les ZAC, il s’agit de tout terrain à bâtir, et non pas seulement ceux destinés à l’habitation ?

La réponse doit être négative ; en effet :
– la première phrase énonce : « la vente d’un terrain… »,
– la deuxième phrase (visant les lotissement et les ZAC) indique « lorsque le terrain »,
– on doit considérer que la deuxième phrase renvoie à la première.

3 – L' »intention de construire » : dans quel délai ?

On ne peut certainement pas retenir le critère fiscal de l’engagement de construire :
– Tout d’abord, parce que le texte parle d' »intention » et non d' »engagement »,
– Et parce que, depuis 1999, l’acquéreur personne physique n’est plus obligé de soumettre son acquisition à la TVA.

 …/… 

Il convient de considérer que c’est l’acquéreur lui-même, par la manifestation de son intention, qui va déclencher le processus de protection, quelque soit le délai dans lequel il compte entreprendre la construction ou l’extension.
La seule limite à la prise en compte de cette intention est que cette dernière soit objectivement et juridiquement réalisable au moment où elle se manifeste : il faut donc que le terrain soit constructible au regard des règles d’urbanisme en vigueur au jour de la vente.

4 – L' »intention de construire un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel » : qu’en est-il des futures constructions à usage pour partie commercial ou de bureaux et pour partie à usage d’habitation ?
Il convient de faire la même lecture que pour le champ d’application du secteur protégé en matière de ventes d’immeubles à construire ou pour celui de la loi du 6 juillet 1989 sur les baux d’habitation : l’article L.111-5-3 ne concerne que les immeubles destinés à l’habitation seule ou à l’habitation et à un usage professionnel au sens des textes précités.
En particulier, la future construction de bâtiments pour partie à usage d’habitation et pour partie à usage d’activité ne saurait entrer dans le champ d’application de l’article L.111-5-3.

5 – Le dispositif vise-t-il les terrains d’assiette des lots de volume destinés à recevoir des constructions à usage d’habitation ?
Qu’en est-il des copropriétés horizontales comportant des lots à bâtir : faut-il borner le lot concerné ou l’assiette de la copropriété ?
Dans l’un et l’autre cas, nous ne sommes pas dans la procédure de lotissement : le bornage n’est donc que du domaine facultatif.

Sous cette première remarque :

En matière de lots de volume, la réponse est positive, mais, de fait, un géomètre-expert sera intervenu pour délimiter les lots de volume et le terrain d’assiette.

– Au regard de la copropriété, il résulte de l’arrêt de la 3è Chambre Civile de la Cour de cassation du 27 avril 2000 que le bornage n’est pas possible entre deux lots de copropriété du fait de l’absence de deux fonds divis ; quant à l’assiette globale de la copropriété, il semble que son bornage irait au-delà du champ d’application voulu par le législateur : il ne s’agit pas du terrain vendu stricto sensu.

6 – Il convient de considérer que les divisions visées par les articles R.315-2 et R.315-54 (ainsi que celles visées par les alinéas a) à e) du R.315-1) ne comportent pas l’obligation de bornage.

7 – « Mention du descriptif du terrain résultant du « bornage » :

* Notion de « descriptif » :

La notion de « descriptif » diffère-t-elle de celle de « désignation » ?

 …/… 

Il semble qu’il faille s’en tenir à la désignation telle que les notaires ont l’habitude de l’indiquer dans leurs actes.

Si des éléments caractéristiques sur le terrain (arbres, bornes existantes, clôtures…) permettent de mieux cerner les limites apparentes, il est certainement utile de les indiquer.

Si des informations existent (notamment par les anciens titres) sur le caractère mitoyen ou non des murs et clôtures, leur rappel évitera bien des interrogations par la suite.

* Que faut-il entendre par « bornage » :

Il ne peut s’agir que du bornage au sens de l’article 646 du Code Civil.

Celui-ci doit être effectué par un géomètre-expert agissant sous sa responsabilité.

En particulier, celui-ci est seul juge de savoir si la validation des limites réelles du terrain nécessite l’établissement d’un procès-verbal contradictoire ou s’il peut se contenter d’autres sources d’information.

Il est à noter que, dans le cas des lotissements en cours de création, le bornage n’est bien sûr pas contradictoire pour les limites séparatives entre lots, puisque le lotisseur est seul propriétaire des deux fonds.

Dernière précision : le bornage fixe les limites du terrain ; il ne s’agit pas, en l’occurrence, d’une garantie de la superficie de ce dernier.

Source : OBLIGATION DE BORNAGE DES TERRAINS A BATIR DESTINES A L'HABITATION