Ou comment l’impôt sur les mutations à titre onéreux d’immeubles peut s’appliquer en l’absence de mutation immobilière… Les fiscalistes n’ignorent pas que les mutations à titre onéreux d’immeubles ne visent pas exclusivement les biens immeubles, mais aussi, par l’effet de dispositions fiscales particulières, des biens ou des droits mobiliers.
C’est le cas, souvent cité (parce que la transparence fiscale de l’écran social a paru extraordinaire sur le plan juridique), de la cession de droits sociaux dans les sociétés immobilières de copropriété transparentes visées par l’article 1655 ter du Code Général des Impôts. Le législateur a entendu assimiler les porteurs de ces droits sociaux aux propriétaires directs d’immeubles. C’est aussi le cas pour les cessions de parts dans les sociétés concessionnaires de l’usage de ports de plaisance, en application de l’article 728 du Code Général des Impôts.
Deux décisions récentes de la Cour de Cassation (Cass. Comm. 23 février 1999, Blot, et Cass. Comm. 30 juin 1998, SCI BAHIA) opèrent la synthèse des solutions jurisprudentielles jusqu’alors dégagées sur cette question. L’impression d’ensemble qui en résulte est celle d’un ensemble cohérent de solutions non équivoques dans leur formulation et propres à éclairer sans subtilité excessive l’acquéreur de parts de ces sociétés. Mais, malheureusement, cette jurisprudence, inspirée par des solutions de continuité, est depuis l’origine conforme à la doctrine de l’administration fiscale. Elle apparaît aussi assez éloignée des intentions originaires du législateur et d’une conception raisonnable de la taxation des mutations immobilières.
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C’est l’article 728 du Code Général des Impôts qui assimile, sur le plan fiscal et au regard des droits d’enregistrement, à des cessions d’immeubles les cessions d’actions ou de parts conférant un droit de jouissance sur des immeubles ou des fractions d’immeubles.
En réalité, cette disposition établit une double fiction, d’abord une fiction de propriété immobilière et ensuite une fiction de mutation de cette même propriété immobilière fictive. Dans ce contexte juridique assez particulier, la jurisprudence de la Cour de Cassation a précisé les conditions d’application générales de l’article 728 du Code Général des Impôts. Elle considère que cette disposition se suffit à elle-même et qu’elle doit recevoir l’application la plus large possible.