« La constructibilité du terrain non acquis de l’aménageur de ZAC » – Etude de M. Sylvain PERIGNON –

Se développe la pratique des ZAC, dite « sans expropriation » ou « ZAC à maîtrise foncière partielle », où l’aménageur revendique un rôle d’ensemblier, de concepteur, de coordinateur, plus qu’un rôle de « lotisseur ».

Dans ces ZAC à maîtrise foncière partielle, la gestion de la densité en termes de quantum de SHON se heurte à de grandes difficultés.

Tout d’abord l’aménageur devrait déduire du quantum de SHON affecté à l’îlot par le règlement d’aménagement de zone (RAZ) la SHON existante des bâtiments non destinés à être démolis.

A notre connaissance, ce travail n’est pas fait et l’aménageur distribue le plus souvent la SHON affectée à l’îlot par le RAZ sans défalquer la SHON existante. Le voudrait-il qu’il se heurterait à des difficultés quasi insolubles : refus des propriétaires de procéder ou de laisser procéder à ce mesurage, frais de l’opération, calcul de la densité disponible lorsque dans le temps certains bâtiments sont partiellement ou totalement démolis.

Les aménageurs soutiennent généralement que la SHON affectée à l’îlot par le PAZ leur appartient, et que les terrains inclus dans la ZAC mais non acquis de l’aménageur sont en quelque sorte privés de tout droit à construire, sauf à racheter de la SHON à l’aménageur.

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 Les services instructeurs des autorisations d’urbanisme se rallient en général à cette thèse, puisqu’ils ne savent calculer la constructibilité du terrain non acquis de l’aménageur, en l’absence d’un cahier des charges. On assiste alors à des pratiques étonnantes : délivrance d’un certificat d’urbanisme de l’article L.111-5 attribuant une SHON au terrain concerné, alors même qu’aucune division de terrain n’est opérée. Le certificat d’urbanisme est alors instruit en prenant avis de l’aménageur, lequel fixe la constructibilité du terrain. Le propriétaire du terrain accepte quelquefois de se soumettre volontairement à « un cahier des charges de cession de terrain », lequel fixe une SHON alors même qu’il n’y a nulle cession de terrain par l’aménageur.

Il est toutefois permis de s’interroger sur le fondement juridique de ces pratiques. Si par exemple, l’aménageur ne possédait aucun terrain sur un îlot et si un propriétaire possédait la totalité de l’îlot on ne saurait dénier à ce dernier la faculté de construire dans le respect du PAZ et de consommer la totalité de la SHON affectée à l’îlot.

Si l’aménageur possède 50 % de la superficie de l’îlot et si un propriétaire possède le reliquat, ce dernier sera en droit de pouvoir consommer 50 % de la SHON (déduction faite de la SHON d’éventuels bâtiments existants), sans avoir à acheter les droits à construire à l’aménageur. Ne pas l’admettre reviendrait à frapper les terrains non acquis de l’aménageur d’une sorte de servitude non aedificandi ne pouvant être levée qu’avec l’accord de l’aménageur, servitude d’urbanisme qui n’aurait aucun fondement légal.

Dans le cadre d’une ZAC avec PAZ fixant un quantum de SHON par îlot, le propriétaire d’un terrain non acquis de l’aménageur nous semble avoir le droit de consommer une fraction de la SHON globale affectée à l’îlot, déterminée au prorata de la superficie de son terrain par rapport à la superficie totale de l’îlot. Sur le plan pratique, on conseillera au propriétaire d’un tel terrain de demander un certificat d’urbanisme au titre de l’article L.410-1-b (certificat renseignant sur la possibilité de réaliser une opération déterminée). La question posée dans cette demande de certificat d’urbanisme serait par exemple : « l’opération suivante est-elle possible : construction d’un bâtiment ayant telle destination et une SHON de X m² ? ». Dans cette demande, la SHON indiquée serait calculée grosso modo en appliquant la règle de prorata évoquée ci-avant.

Il est toujours souhaitable qu’un partenariat s’instaure entre l’aménageur d’une ZAC et les propriétaires de terrains non acquis de l’aménageur. Mais ce partenariat doit se développer sur la base de principes clairs, et non pas sur cette fiction juridique obligeant le propriétaire à racheter des droits à construire qui n’appartiendrait qu’à l’aménageur et que lui seul pourrait céder.

Source : Construction-Urbanisme, avril 2000 page 5