Entrée en vigueur le 1er octobre de la réforme des contrats et des obligations : application dans le temps.
L’ordonnance du 10 février 2016 entre en vigueur le 1er octobre 2016.
Elle opère une réforme substantielle du droit des obligations en général, et du droit des contrats en particulier, de sorte qu’il est capital de savoir comment ce nouveau texte s’appliquera aux situations contractuelles passées, présentes et à venir.
Principe et exceptions
Les réformateurs ont pris soin de trancher expressément la difficulté à l’article 9 de l’ordonnance.
Il y est expressément indiqué que les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeureront soumis à la loi ancienne et que les procès introduits avant cette date seront jugés par application du droit antérieur, y compris en appel et en cassation.
Où l’on reconnaît le principe de survie de la loi ancienne qui est très classique en matière contractuelle car seul conforme aux impératifs de sécurité juridique et de prévisibilité des solutions.
Toutefois, par dérogation à ce principe, l’ordonnance dispose que plusieurs dispositions s’appliqueront immédiatement aux contrats en cours à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance (art. 1123, al. 3 et 4 ; art. 1158 et art. 1183).
Ces trois textes instituent des actions dites « interrogatoires » visant à permettre à un cocontractant ou candidat contractant de dissiper une incertitude qui affecte la validité de l’acte conclu ou à conclure, qu’il s’agisse de l’existence d’un pacte de préférence pouvant grever le bien que l’on s’apprête à acquérir (art. 1123, al. 3 et 4), de l’étendue exacte des pouvoirs du représentant conventionnel (art. 1158) ou de l’intention de l’autre partie d’agir en nullité de la convention conclue (art. 1183).
Ces trois nouveaux outils sont donc immédiatement opérationnels à compter du 1er octobre 2016, y compris à l’égard de contrats conclus avant cette date.
En revanche, toutes les autres dispositions de l’ordonnance relatives à la formation, l’exécution et l’extinction du contrat ne peuvent, selon l’article 9, s’appliquer qu’aux contrats conclus après l’entrée en vigueur du texte.
Application aux promesses de vente
De ces principes, on peut, tout d’abord, déduire qu’une promesse unilatérale conclue avant le 1er octobre 2016 restera soumise au droit ancien, y compris si son dénouement est postérieur à cette date.
La rétractation fautive du promettant ne saurait donc tomber sous le coup de la sanction en nature prévue par le nouvel article 1124 (sauf pour les parties à avoir inséré dans l’acte une clause d’exécution forcée, pareille stipulation ayant été jugée valable sous l’empire du droit ancien).
En revanche, la vente résultant d’une levée d’option postérieure au 1er octobre 2016 sera quant à elle soumise au droit nouveau, quand bien même la promesse serait antérieure à cette date, la vente étant un contrat distinct de la promesse unilatérale dont elle procède.
S’agissant des promesses synallagmatiques conclues avant le 1er octobre 2016, tout dépend de la portée juridique qu’on leur reconnaît.
Si la promesse vaut d’ores et déjà vente (ce qui est le principe dès lors qu’il y a consentement réciproque sur la chose et le prix : art. 1589, al. 1er), la réitération par acte authentique après le 1er octobre 2016 ne saurait conduire à soumettre la vente à la loi nouvelle, celle-ci ayant été formée dès la conclusion de la promesse.
En revanche, si les parties n’ont pas seulement retardé le transfert de propriété mais subordonné l’existence même de la vente à la réitération de leur consentement devant notaire, la promesse synallagmatique ne peut valoir vente : une réitération postérieure au 1er octobre 2016 donnera alors naissance au contrat de vente qui sera soumis au nouveau droit contractuel, pour être né après l’entrée en vigueur de l’ordonnance.
Modifications, prorogation, renouvellement…
S’agissant, ensuite, des contrats conclus avant le 1er octobre 2016, mais qui viendraient à être modifiés, renouvelés, prorogés ou tacitement reconduits après cette date, il convient d’opérer les distinctions suivantes.
La modification par avenant
L’avenant est un nouvel accord de volonté qui modifie le contrat.
Toutes les modifications résultant de l’avenant conclu à compter du 1er octobre seront soumises à la loi nouvelle.
Les dispositions inchangées du contrat demeureront, en revanche, gouvernées par la loi ancienne.
La prorogation
Le contrat prorogé est celui qui, avant l’échéance du terme, voit sa durée initiale prolongée par une décision des parties.
Le nouvel article 1213 du Code civil indique à cet égard :
« Le contrat peut être prorogé si les contractants en manifestent la volonté avant son expiration« .
C’est donc le même contrat qui se poursuit.
Il demeure, dès lors, soumis à la loi antérieure, sauf à caractériser une fraude de la part des parties qui auraient utilisé ce moyen pour éviter de se soumettre à la loi nouvelle.
Le renouvellement
La solution n’est pas la même en cas de renouvellement qui opère après expiration du contrat initial.
Le nouvel article 1214, alinéa 2 du Code civil énonce :
« Le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent mais dont la durée est indéterminée ».
Il y aura donc lieu d’appliquer la loi en vigueur au jour du renouvellement.
La tacite reconduction
Le principe sera le même s’agissant de la tacite reconduction qui concerne l’hypothèse d’un contrat arrivé à terme mais dont les contractants continuent d’exécuter les obligations.
L’article 1215 du Code civil indique, en ce sens, qu’elle « produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat ».