Réforme de la TVA immobilière : la nouvelle définition des terrains à bâtir selon des critères objectifs n’est pas exempte d’incertitudes.
Avant le 11 mars 2010, un terrain était « à bâtir » dans le cas où l’acquéreur exprimait dans l’acte d’acquisition son intention d’y construire (avec ou sans démolition préalable de l’existant) ou d’achever une construction en cours ou encore de procéder à la surélévation d’un bâtiment existant.
Désormais, le terrain à bâtir est défini selon des critères objectifs par l’article 257, I-2-1° du Code Général des Impôts (CGI) qui prévoit que sont considérés « comme terrains à bâtir les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d’un plan local d’urbanisme, d’un autre document d’urbanisme en tenant lieu, d’une carte communale ou des dispositions de l’article L 111-1-2 du Code de l’urbanisme« .
Dans l’attente des précisions qu’apportera l’administration, plusieurs questions se posent pour identifier les immeubles qui répondent à cette définition fondée sur les règles du droit de l’urbanisme.
Deux sources d’incertitudes sont identifiables : l’une a trait aux critères permettant de déterminer si un terrain nu est ou non à bâtir, l’autre concerne les cas dans lesquels un terrain recouvert de bâtiments est susceptible de perdre sa qualification d’immeuble bâti pour suivre le régime du terrain à bâtir.
Quels sont les biens constituant des terrains à bâtir au sens de l’article 257, I-2-1° du CGI ?
La cession d’un terrain à bâtir est taxable de plein droit, sur le prix total ou sur la marge (selon que l’acquisition avait ou non ouvert droit à déduction), tandis qu’elle est exonérée pour un terrain qui n’est pas à bâtir, sauf option du cédant pour le paiement de la TVA mais la taxe est alors toujours calculée sur la base du prix de vente total.
Or, si le critère légal est désormais objectif, la référence à la réglementation de l’urbanisme ne facilite pas pour autant l’appréciation car un plan local d’urbanisme (PLU) comporte plusieurs zones qui appellent une appréciation différente de la constructibilité des terrains qui s’y trouvent implantés.
Les zones U ne posent pas de difficultés : ce sont par nature des zones constructibles dans lesquelles peuvent être autorisées des constructions.
En revanche, une première difficulté se présente avec les zones AU c’est-à-dire les « secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l’urbanisation » (article R 123-6 du Code de l’urbanisme).
Le Code de l’urbanisme distingue entre deux catégories de zones AU : celles qui sont ouvertes immédiatement à l’urbanisation et celles qui ne le sont pas (zones fermées).
En tout état de cause, la seule circonstance qu’un terrain soit classé en zone AU n’est pas en soi un critère suffisant pour déterminer si des constructions peuvent y être admises : il importe d’examiner la localisation de la zone, la présence d’équipements ou non et les dispositions du règlement et du plan d’aménagement et de développement durable y afférent.
Une deuxième difficulté paraît exister pour les terrains situés dans les zones A qui pourraient, le cas échéant, être également concernées.
En effet, si elles sont habituellement considérées comme des zones inconstructibles, car de protection de l’activité agricole, elles peuvent cependant accueillir des « constructions et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif et à l’exploitation agricole« .
Elles disposent donc d’une sorte de « constructibilité limitée » en fonction de la destination des constructions projetées.
Une troisième difficulté semble résulter de l’existence dans la réglementation de l’urbanisme, en plus des règles de zonage évoquées ci-dessus, de certains outils dont l’administration devra préciser les conséquences au regard de la définition du terrain constructible pour l’application de la TVA.
Se pose, notamment, la question du sort de la portion d’un terrain constructible frappée d’un emplacement réservé, cette réserve le rendant inconstructible pour toute personne autre que son bénéficiaire, dans les conditions prévues par cette réserve.
Les précisions qu’apportera l’administration sur le nouveau régime sont particulièrement attendues sur ces différents points.
Un immeuble bâti peut-il être considéré comme un terrain à bâtir ?
Tel était très habituellement le cas sous le régime antérieur : tout terrain acquis en vue de la construction prochaine d’un immeuble constituait un terrain à bâtir.
Pouvaient ainsi constituer des terrains à bâtir les terrains nus ou recouverts de bâtiments destinés à être démolis, les immeubles inachevés et les droits de surélévation d’immeubles préexistants.
Désormais, les situations au regard de la TVA et des droits d’enregistrement sont clairement dissociées.
Pour l’application des droits d’enregistrement, le sort de l’opération au regard de l’exonération prévue par les dispositions de l’article 1594-0G du CGI continue d’être apprécié en fonction de l’intention de l’acquéreur : si elle ne vise plus explicitement les terrains munis de bâtiments à démolir, la loi prévoit que l’exonération concerne tout immeuble sur lequel l’acquéreur prend l’engagement d’effectuer dans un délai de quatre ans, susceptible d’être prolongé, les travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf ou ceux nécessaires pour terminer un immeuble inachevé.
Pour l’application de la TVA se pose désormais la question de savoir si la notion de « terrains sur lesquels une construction peut être édifiée » à laquelle se réfère le nouvel article 257, I-2-1° du CGI est susceptible d’inclure ou non des terrains munis de constructions.
Les immeubles inachevés paraissent pouvoir être écartés du débat puisque la loi les assimile à des immeubles neufs (CGI art. 257, I-2-2°).
En revanche, deux types de questions peuvent se poser en ce qui concerne des terrains munis de bâtiments.
L’administration pourrait faire le choix de considérer qu’un immeuble peut être un terrain à bâtir lorsque sa vétusté implique nécessairement que l’acquéreur n’aura pas d’autre choix pour en faire usage, que de procéder à sa démolition ou d’y faire procéder à des travaux d’une ampleur telle que leur réalisation est assimilée, par la loi, à la production d’un immeuble neuf (CGI art. 257, I-2° -2).
Il est vraisemblable, dans ce cas, que la qualification de l’immeuble ne pourrait dépendre que d’une appréciation au cas par cas de l’état des bâtiments concernés.
La question se pose également de savoir si, et dans quelle mesure, l’existence de droits à construire résiduels attachés à un terrain bâti est susceptible de lui conférer la qualification de terrain à bâtir au sens de l’article 257, I-2-1° du CGI dès lors qu’il peut accueillir de nouveaux bâtiments ou des surfaces de planchers supplémentaires.