Caractère anticoncurrentiel d’un bail portant sur la location d’un espace commercial.
Les contrats de bail commercial conclus entre les propriétaires de différents centres commerciaux et un distributeur exploitant plusieurs magasins à grande surface comportaient une clause octroyant à ce dernier le droit de s’opposer à la location d’espaces commerciaux à des tiers.
Interrogée par voie de question préjudicielle sur le caractère anticoncurrentiel de ces contrats, la Cour de justice de l’Union européenne a considéré que la seule présence de cette clause n’implique pas que le contrat de bail a « pour objet » de restreindre la concurrence.
Un accord ne comporte une restriction de concurrence par objet que s’il présente, en lui-même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence.
Au cas particulier, même si la clause aurait potentiellement pour effet de restreindre l’accès des concurrents du distributeur aux centres commerciaux, une telle circonstance, à la supposer établie, n’implique pas de manière manifeste que les contrats contenant cette clause restreignent le jeu de la concurrence sur le marché local du commerce de détail alimentaire.
En revanche, de tels contrats peuvent avoir « pour effet » de restreindre le jeu de la concurrence s’il apparaît, après une « analyse approfondie du contexte économique et juridique dans lequel ils s’insèrent« , ainsi que les spécificités du marché de référence, qu’ils contribuent de manière significative à un éventuel cloisonnement de ce marché.
L’importance de la contribution de chaque contrat à ce cloisonnement dépend, notamment, de la position des parties contractantes sur le marché et de la durée de ce contrat.
Pour apprécier les effets d’un accord sur la concurrence, il faut prendre en considération le contexte économique et juridique au sein duquel celui-ci se situe et où il peut concourir, avec d’autres, à un effet cumulatif sur le jeu de la concurrence.
Cela implique d’examiner d’abord les conditions d’accès au marché de référence et le jeu de la concurrence sur ce marché.
Pour examiner les conditions d’accès au marché, il convient d’apprécier si, dans les zones de chalandise où se situent les centres commerciaux couverts par ces contrats, il existe des possibilités pour un concurrent de s’y implanter, notamment en s’installant dans des locaux d’autres centres commerciaux.
A cette fin, doivent être pris en compte la disponibilité et l’accessibilité du foncier commercial dans les zones de chalandise concernées, ainsi que de l’existence de barrières économiques, administratives ou réglementaires s’opposant à l’entrée de nouveaux concurrents sur ces zones.
Les conditions du jeu de la concurrence sur ce marché doivent s’apprécier en tenant compte du nombre et de la taille des opérateurs présents, du degré de concentration sur ce marché, de la fidélité des consommateurs aux enseignes existantes et des habitudes de consommation.
S’il est constaté que l’accès au marché est rendu difficile par l’ensemble des contrats similaires relevés sur ce marché, il convient alors d’analyser dans quelle mesure ceux-ci contribuent à un éventuel cloisonnement, les accords contribuant de manière significative à ce cloisonnement étant interdits.
L’importance de la contribution de chaque contrat à ce cloisonnement dépend, notamment, de la position des parties contractantes sur le marché et de la durée de ce contrat.