CE 16 Juin 2004

Le Conseil d’Etat indique les critères qui permettent d’admettre qu’un bailleur qui consent à son locataire une réduction de loyer et donc un abandon de créance ne commet pas un acte anormal de gestion.

Dans cette affaire, une SA Imprimerie Borel avait loué des locaux à la SARL Imprimerie Borel. Devant les difficultés financières de sa locataire (déficit d’exploitation de 1,10 MF), le bailleur lui avait consenti un abandon de créance de loyer à hauteur de 800 000 F.

La Cour Administrative d’Appel avait refusé d’admettre qu’il s’agissait d’une activité normale pour le bailleur, mais le Conseil d’Etat estime que les faits ont été dénaturés.

Jugeant l’affaire au fond il confirme la validité de l’abandon de créance :

« Considérant que l’abandon de créance consenti par une entreprise au profit d’un tiers ne relève pas en règle générale d’une gestion commerciale normale, sauf s’il apparaît qu’en consentant de tels avantages, l’entreprise a agi dans son propre intérêt ; (…)

Considérant qu’ainsi qu’il a été dit les difficultés de trésorerie de la SARL Imprimerie Borel étaient sérieuses ; que l’abandon de créance, inférieur à 10 % du loyer et assorti d’une clause de retour à meilleure fortune, était destiné à rétablir la situation financière temporairement dégradée du locataire gérant ; que dès lors, la société requérante établit qu’il était de son intérêt de renoncer, en 1990, à percevoir la totalité du loyer dû par le preneur, et est par suite fondée à soutenir que c’est à tort que, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation d’impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie en raison dudit abandon de créance au titre de l’année 1990″.

Note :

Pour éviter que l’administration considère que l’abandon de créance de loyer est un acte anormal de gestion, qui a pour conséquence de le soumettre à un supplément d’impôt sur les sociétés, le créancier doit prouver qu’il a agi dans son intérêt.

Le Conseil d’Etat relève trois éléments qui ont contribué à établir cette preuve :

– la difficulté financière du locataire était établie ;

– l’abandon de créance était d’un montant inférieur à 10 % du loyer et comportait une clause de retour à meilleure fortune, ce qui ouvre la possibilité un remboursement ultérieur,

– il était destiné à rétablir une situation financière temporairement dégradée.

Source : Juris-Hebdo, 29 Juin 2004 page 3