La sûreté accordée par une société civile immobilière (SCI) en garantie des dettes d’un associé, même lorsqu’elle porte sur son seul actif, n’est pas contraire à l’intérêt social si elle permet de régler des créances du groupe dont la SCI fait partie et d’assurer la sauvegarde de celui-ci.
Une sûreté accordée par une société civile en garantie de la dette d’un associé n’est pas valable si, en étant de nature à compromettre l’existence de la société, elle est contraire à l’intérêt social.
Il en est ainsi même lorsque la sûreté entre dans l’objet social (Cass. com., 23-9-2014).
Ce principe a été appliquée dans un cas où des sociétés commerciales qui faisaient partie d’un groupe et bénéficiaient d’une procédure de sauvegarde avaient conclu un protocole d’accord avec un partenaire commercial ; aux termes de ce protocole, le partenaire s’était engagé à payer les créances des fournisseurs de ces sociétés et une SCI, filiale de l’une d’elles, avait accepté d’affecter en garantie du remboursement des sommes ainsi payées son seul bien immobilier.
Les sociétés commerciales ayant été mises en liquidation judiciaire, la SCI avait demandé l’annulation de la garantie hypothécaire en faisant valoir qu’elle était contraire à son intérêt.
Cette demande a été rejetée pour les raisons suivantes :
– tous les associés de la SCI réunis en assemblée avaient autorisé la garantie en rappelant que le protocole d’accord conclu le même jour avait pour objet d’organiser le paiement des créances des fournisseurs par le partenaire afin de permettre le réapprovisionnement rapide des sociétés commerciales et qu’il prévoyait les modalités de remboursement des sommes payées par celui-ci ainsi que l’octroi de la garantie par la SCI, à laquelle le partenaire consentait un prêt de 300.000 € d’une durée de 36 mois ;
– les associés de la SCI avaient pris acte que de ces accords, autorisés par le juge-commissaire, s’inscrivaient dans le processus de sauvegarde des autres sociétés du groupe ;
– en l’absence de cette garantie, la procédure de sauvegarde de la société commerciale qui contrôlait la SCI aurait été vouée à l’échec.
La faute de gestion du gérant d’une société civile immobilière s’apprécie au regard de l’intérêt général.
Note de Mme Annick CAYROL-CUISIN :
Le Code civil pose en principe que, dans les rapports entre associés, le gérant d’une société civile peut accomplir tous les actes de gestion que demande « l’intérêt de la société » (C. civ., art. 1848, al. 1).
Le même Code affirme la responsabilité personnelle du gérant à raison « des fautes commises dans sa gestion » (C. civ., art. 1850, al. 1).
Il s’ensuit raisonnablement que les actes accomplis par le gérant au mépris de l’intérêt social sont susceptibles de constituer des fautes de gestion et, a contrario, que les actes conformes à l’intérêt social ne devraient pas constituer de telles fautes.
C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans une décision en date du 9 décembre 2014.
Dans l’affaire en cause, l’associée d’une société civile immobilière allègue un préjudice financier résultant de l’absence de dividendes.
Elle reproche au gérant de n’avoir proposé aucune distribution de dividendes durant la période où la société, devenue par la suite structurellement déficitaire du fait des charges d’une acquisition immobilière viagère devenues supérieures aux loyers procurés par la location de l’immeuble, engrangeait des bénéfices.
La Cour d’appel retient que la privation de sa part des bénéfices sociaux, pendant près de dix années successives, a causé un préjudice à l’associée et que le gérant a commis un faute de gestion en ne proposant pas, en temps utile, la distribution des bénéfices réalisés par la société.
Au visa de l’article 1850, alinéa 1, elle est censurée par la Cour de cassation qui lui fait grief de ne pas avoir caractérisé « une faute de gestion contraire à l’intérêt social« .