Deux actionnaires cèdent les actions composant le capital d’une société ; le cessionnaire payant en retard le solde du prix, les cédants l’assignent en paiement des intérêts légaux sur le solde du prix des actions sur le fondement de l’article 1652 du Code Civil, aux termes duquel l’acheteur doit l’intérêt du prix, notamment si la chose vendue produit des fruits.
Mais les actions produisent-elles des fruits ? La Cour d’Appel répond par la négative au motif que les dividendes des actions ne peuvent être assimilés à des fruits civils, car leur perception suppose l’existence des bénéfices aléatoires, et d’une décision de l’assemblée arrêtant leur distribution.
La Cour de Cassation censure :
« Attendu qu’en statuant ainsi alors que les sommes qui, faisant partie du bénéfice distribuable, sont, soit en vertu des statuts, soit après décision de l’assemblée générale, réparties entre les actionnaires, participent de la nature des fruits, la cour d’appel a violé les textes susvisés (art. 586 et 1652 du Code civil). »
La solution avait déjà été consacrée par la Cour de Cassation en 1931 (Cass. Civ., 21 oct. 1931). Elle avait paru être abandonnée ensuite, à propos de la date de naissance de la créance de dividendes. Il faut cependant se garder de toute extrapolation ; la Cour de Cassation reconnaît seulement ici la nature de fruits des sommes constituant le bénéfice distribuable, pour les besoins de l’application des articles précités du Code Civil. Aussi bien, il ne semble pas qu’il faille revenir sur les analyses selon lesquelles les dividendes attachés aux actions cédées doivent revenir à celui qui, du cédant ou du cessionnaire, est actionnaire au moment de la décision de l’assemblée générale des actionnaires arrêtant la répartition du bénéfice distribuable.