CASS. COM. 31 Mars 2010

Garantie autonome à première demande : le donneur d’ordre peut invoquer le manquement contractuel du garant de premier rang pour engager sa responsabilité délictuelle.

Une société conclut avec une entreprise publique étrangère un contrat de fourniture de matériel, qui donne lieu à l’émission d’une garantie de bonne exécution, puis d’une contre-garantie.

A la suite du refus d’exportation, le fournisseur, donneur d’ordre, en avise son client, qui met en jeu la garantie.

Le donneur d’ordre, après avoir remboursé la banque contre-garante, assigne les deux banques en paiement sur le fondement du manquement contractuel de la banque garante, qui n’aurait pas respecté les règles uniformes de la Chambre de Commerce Internationale applicables en matière de garantie à première demande justifiée.

La Cour d’appel déclare l’action recevable contre la garante et la condamne au paiement.

Celle-ci forme un pourvoi, essentiellement fondé sur l’indépendance du principe entre les engagements du garant de premier rang à l’égard du bénéficiaire et du donneur d’ordre à l’égard du contre-garant, qui exclut que le donneur d’ordre puisse mettre en jeu sa responsabilité délictuelle en invoquant son manquement contractuel.

Sur la recevabilité, la chambre commerciale juge que « le donneur d’ordre d’une garantie autonome à première demande, tenu de rembourser son contre-garant des sommes versées en exécution de cette contre-garantie, est en droit d’agir en responsabilité contre le garant de premier rang qui, en payant le bénéficiaire, n’a pas respecté les conditions définies dans la garantie de premier rang« .

Sur le fond, la Cour ajoute que « l’indépendance de la contre-garantie à l’égard de la garantie de premier rang n’interdit pas au donneur d’ordre, tenu au titre de la garantie autonome à première demande, d’agir en responsabilité contre l’un quelconque des garants qui, par sa faute, l’a contraint de payer« .

Note de Mme Pauline PAILLER :

La contre-garantie est indépendante de la garantie à première demande (Cass. com., 12 déc. 1984).

Seul l’abus manifeste du bénéficiaire peut faire échec à l’appel (C. civ., art. 2321, al. 2).

Mais la règle d’autonomie n’exclut pas que le donneur d’ordre, tiers au contrat de garantie de premier rang, puisse invoquer le manquement contractuel de la garante sur le fondement de la responsabilité délictuelle si ce manquement lui a causé un dommage (Cass. ass. plén., 6 oct. 2006).

Source : Droit & Patrimoine Hebdo, n° 784, page 2