La banque qui finance la construction d’un accédant ayant signé un Contrat de Construction d’une Maison Individuelle (CCMI) avec fourniture du plan doit vérifier que le contrat comporte bien les énonciations et documents requis par l’article L 231-2 du Code de la Construction et de l’Habitation (CCH) et ne peut débloquer les fonds tant qu’elle n’a pas communication de l’attestation de garantie de livraison à prix et délai convenus (CCH art. L 231-10).
Des particuliers font édifier leur maison dans le cadre d’un CCMI, le financement étant assuré par un prêt bancaire. Le constructeur, qui s’était fait remettre une grande partie des fonds sur présentation de fausses situations de travaux et qui n’avait pas contracté la garantie de livraison tout en fournissant une attestation ambiguë, abandonne le chantier en cours d’exécution.
Se voyant dans l’obligation du supporter le coût d’achèvement de la construction, les maîtres de l’ouvrage engagent une action en responsabilité contre la banque, lui reprochant d’avoir procédé au déblocage des fonds sans vérifier l’existence de la garantie de livraison.
La Cour d’appel rejette leur demande, considérant que la responsabilité du banquier ne peut être recherchée sur le fondement de l’article L 231-10 du CCH, lequel ne prévoit de sanction contre le prêteur, en cas de défaillance du constructeur, que lorsque les versements excèdent les seuils légaux et si ceux-ci sont fondés sur l’exécution d’une clause irrégulière du contrat, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. En outre, elle juge que, compte tenu du caractère formel de l’intervention de la banque, sa responsabilité ne peut pas être recherchée dans le cadre d’une vérification de l’attestation de garantie communiquée.
La décision est censurée par la Cour de cassation sur le fondement du droit commun : en cas d’inexécution, toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-intérêts.
Pour la Cour Suprême, l’article L 231-10 du CCH n’exclut, dans aucune de ses dispositions, de sanctionner, sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile, le manquement imputé au prêteur qui a l’obligation de ne débloquer les fonds qu’après avoir vérifié que le document repris constitue l’attestation de garantie dont la communication est prévue.
Note :
La Cour de cassation se prononce sur le champ de la responsabilité du banquier finançant la construction d’une maison individuelle. Cette responsabilité, dont l’origine réside dans les relations contractuelles que le contrat de prêt établit entre prêteur et maître de l’ouvrage, est soumise au droit commun.
Elle n’est pas seulement engagée lorsque la loi le prévoit par une disposition particulière et en prévision d’une situation spécifique. La violation quelconque d’une obligation pesant sur la banque entraîne la mise en jeu de sa responsabilité .De ce point de vue, les obligations à la charge du banquier s’étendent à celles que prévoit le droit commun et à toutes celles que la loi énonce comme étant attachées à tel ou tel contrat.
Les obligations en cause caractérisant une obligation de faire (la vérification imposée) et une obligation de ne pas faire (le déblocage des fonds hors justification de la garantie de livraison), leur inexécution donne lieu à dommages-intérêts (C. civ. art. 1742 et 1747).