Deux magasins séparés par une voie de circulation impossible à traverser ne sont pas situés sur un même site (Cass. Com., 19 juin 2001) et un programme d’aménagement d’ensemble n’est pas caractéristique d’une même opération d’aménagement foncier au sens de l’article 29-1 de la loi du 27 décembre 1973.
Note de M. BENOIT-CATIN :
On sait que la loi dite Doubin du 31 décembre 1990 s’est directement inspirée de la jurisprudence en adoptant, sous l’appellation d' »ensemble commercial », le concept d’unité économique qu’avaient assez rapidement élaboré le Conseil d’Etat et la doctrine administrative pour intégrer dans le champ de l’autorisation d’urbanisme commercial des établissements distincts mais non dénués d’intérêts communs. Inséré sous l’article 19-1 de la loi du 27 décembre 1973, l’ensemble commercial est identifié à partir de deux critères limitatifs moins imprécis que ceux qui présidaient à la définition de l’unité économique : les magasins doivent être implantés sur le même site et être fédérés par un lien répondant à des conditions également limitativement énumérées.
C’est à l’occasion d’un litige placé sur le terrain de la concurrence déloyale que la chambre commerciale de la Cour de cassation approuve la démarche du juge du fond qui a constaté :
« que les deux magasins D. sont réunis par une structure juridique commune mais ne peuvent être considérés comme installés sur un même site, c’est à dire dans une même zone géographique, dès lors que distants de 300 mètres environ, ils sont séparés par une voie de circulation impossible à traverser et que la communication entre les deux points de vente ne peut s’effectuer que par des carrefours giratoires, conduisant à un rallongement des trajets. »
Le site, qui fait appel à une perception essentiellement visuelle, se laisse difficilement appréhender par des critères juridiques. Il est certain que la notion implique l’idée d’une même zone géographique, mais celle-ci doit sans doute être définie à partir de facteurs distincts des découpages administratifs ou même opérationnels dans la mesure où le site ne se confond pas avec le périmètre d’une opération foncière en vertu de la loi elle-même. Il semble donc que le site puisse être regardé comme une entité géographique homogène d’une dimension pertinente et que toute rupture naturelle ou artificielle, constituant une entrave à la circulation au sein de cette aire suffise à différencier deux sites distincts (Rappr. CAA Bordeaux, 30 déc. 1993).
Le second critère s’appréhende à partir de l’une des quatre conditions qui doivent alternativement être réunies pour caractériser ce lien. La première condition, en cause dans la deuxième espèce, se réfère aux magasins qui, réunis sur un même site, « ont été conçus dans le cadre d’une même opération d’aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou plusieurs tranches ». Selon la doctrine administrative il s’agit des opérations définies au Titre 1er du Livre III du Code de l’Urbanisme, c’est à dire les ZAC, les opérations de restauration immobilière et les lotissements. En seraient donc exclus les opérations d’aménagement non définies par une procédure ainsi que les programmes d’aménagement d’ensemble prévus par l’article L.332-9 du Code de l’Urbanisme. C’est ce dernier point qu’avait à examiner la Cour administrative d’appel de Lyon. Infirmant la position des juges du premier degré qui avaient considéré que le PAE constituait une opération d’aménagement foncier au sens de l’article L.300-1 du Code de l’Urbanisme et de l’article 29-1 de la loi Royer, le juge d’appel annule le jugement.