Devoir de mise en garde du banquier dispensateur de crédit envers l’emprunteur.
Pour financer le prix d’acquisition d’un fonds de commerce de restauration et le coût des travaux, une banque avait accordé à une société en cours de constitution, représentée par ses associés fondateurs, un prêt de 457.347 € remboursable in fine en capital sur dix ans.
Le prêt est garanti, notamment, par le nantissement judiciaire du fonds de commerce, le cautionnement solidaire des associés, le blocage des comptes courant d’associés et le placement des fonds des associés sur deux contrats d’assurances-vie nantis au profit de la banque.
La Cour de cassation a jugé qu’il résultait des circonstances suivantes que la société était un emprunteur non averti et que, en lui faisant souscrire un prêt in fine manifestement inadapté, la banque lui avait fait prendre, sans la mettre en garde, un risque financier totalement inutile et excessif :
– lors de la souscription du prêt, la société en cours de constitution n’avait aucune expérience et ses associés fondateurs étaient profanes, l’un en matière financière et l’autre de la pratique de la restauration, de sorte qu’ils ne pouvaient pas, en l’absence de conseils de la banque, connaître les risques inhérents à cette opération financière si les résultats de la société, dans une activité à risque et fortement fluctuante, ne s’avéraient pas aussi prometteurs que le laissait entrevoir l’analyse financière ;
– le montage de l’opération de financement, opéré à l’initiative de la banque, était très surprenant, la souscription de prêts remboursables in fine n’étant généralement proposée que dans des opérations se dénouant en totalité à la date du remboursement unique du prêt ; or la société n’avait jamais manifesté l’intention de céder le fonds de commerce à l’échéance et il n’avait jamais été envisagé que les fonds nécessaires au remboursement seraient obtenus intégralement par le produit des deux contrats d’assurances-vie ;
– si la société avait utilisé les fonds des associés et souscrit un prêt amortissable, les mensualités auraient été d’un montant pratiquement identique à celles résultant du prêt in fine.