Le prêteur qui a donné mainlevée des inscriptions hypothécaire sans exiger le remboursement du prêt par la société de construction-vente peut voir sa responsabilité recherchée par les associés qu’il a assignés en paiement du solde de prêt.
Note de M.M. F.-J. CRÉDOT et Th. SAMIN :
Aux termes de l’article L. 211-2, alinéa 2, du Code de la construction et de l’habitation « les associés [des sociétés civiles constituées en vue de la revente d’immeubles] sont tenus du passif social sur tous leurs biens à proportion de leurs droits sociaux. Les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu’après mise en demeure adressée à la société et restée infructueuse« .
Les associés ne sont tenus du passif social qu’en tant que débiteurs subsidiaires (Cass. 3e civ., 31 mai 1995).
Une caisse de crédit mutuel avait consenti à une société civile immobilière de construction-vente un prêt immobilier assorti de garanties hypothécaires et destiné au financement de l’acquisition de biens immobiliers.
Elle avait donné mainlevée des inscriptions à la suite de la vente des biens et du versement du prix sur le compte bancaire de la société. Celle-ci avait ultérieurement cessé de régler les échéances et, après mise en demeure, la caisse avait assigné en paiement du solde du prêt les deux associés, lesquels avaient mis en cause sa responsabilité.
Les juges du fond avaient débouté ceux-ci, considérant qu’ils ne pouvaient reprocher à la caisse d’avoir donné mainlevée des inscriptions sans avoir exigé le remboursement du prêt, au motif que les sommes provenant des ventes avaient été portées au crédit du compte bancaire de la société qui avait ainsi pu bénéficier du maintien du prêt. Certes, les associés ne pouvaient prétendre au bénéfice de l’article 2314 du Code civil selon lequel « la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de la caution« .
Leur responsabilité légale ne s’assimile pas à un cautionnement (Cass. com., 9 déc. 2008). S’ils ne sont pas liés contractuellement au créancier de la société, les associés peuvent agir reconventionnellement contre ce dernier qui les poursuit.
Ainsi, une banque créancière a été condamnée à indemniser un associé en raison de la faute qu’elle avait commise en ayant accepté, dans des conditions suspectes, de verser des fonds destinés à la réalisation de travaux pour une société directement à celle-ci et non aux entrepreneurs comme initialement convenu, renonçant ainsi à exercer son contrôle sur l’affectation du crédit (CA Nîmes, 18 sept. 2003).
La cassation s’imposait : « attendu qu’en se déterminant par de tels motifs impropres à écarter à l’égard des associés la responsabilité de la caisse, la Cour d’appel, n’a pas donné de base légale à sa décision« .
Le fait que la mainlevée des garanties hypothécaires sans remboursement du prêt ait pu profiter à la société, dès lors que les fonds avaient été portés au crédit de son compte, ne pouvait exclure les conséquences préjudiciables pour les associés qui en résultaient. Il a été jugé qu’une caution hypothécaire pouvait valablement invoquer la perte du bénéfice de subrogation par le fait du créancier ayant, en accord avec la société en règlement judiciaire, assistée de son syndic, renoncé au nantissement commercial de caravanes (Cass. com., 17 mars 1992).