Qualification des travaux de construction : grosses réparations ou améliorations ?
L’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien et les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire (C. civ., art. 605) ; à la cession de l’usufruit, l’usufruitier ne peut réclamer aucune indemnité pour les améliorations qu’il prétendrait avoir faites, encore que la valeur de la chose en fût augmentée (art. 599, al. 2).
Une Cour d’appel avait estimé que les travaux de démolition, de reconstruction d’une habitation d’une superficie supérieure, de construction d’une piscine et d’aménagement du terrain réalisés par l’usufruitier d’une propriété correspondaient à des grosses réparations incombant aux nus-propriétaires.
La Cour de cassation a censuré cette décision : l’article 606 du Code civil énumère limitativement les grosses réparations et les travaux en cause constituaient des améliorations.
Note :
La décision a été rendue en matière d’ISF : en l’espèce, l’usufruitier avait emprunté pour réaliser les travaux et porté la dette au passif de son ISF ; l’administration fiscale, estimant que les travaux en cause constituaient des grosses réparations à la charge du nu-propriétaire, avait réintégré la dette dans le patrimoine taxable de l’usufruitier.
Elle est intéressante sur le plan juridique en ce qu’elle rappelle que la liste des grosses réparations donnée par l’article 606 du Code civil est limitative.
C’est du moins ce que jugeait la 3e chambre civile de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 25-10-1983 ; Cass. 3e civ., 27-11-2002). Cette chambre est souvent appelée à appliquer ce texte car de nombreux baux commerciaux contiennent une clause selon laquelle seules les grosses réparations visées par l’article 606 du Code civil sont à la charge du bailleur.
Cette clause est la source d’un abondant contentieux car le texte, vieux de deux cents ans, est inadapté aux contraintes de gestion des immeubles modernes.
La 3e chambre a en conséquence récemment donné une définition générale des grosses réparations d’entretien (« au sens de l’article 606 du Code civil, les réparations d’entretien sont celles qui sont utiles au maintien permanent en bon état de l’immeuble tandis que les grosses réparations intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale« , cf. Cass. 3e civ., 13-7-2005) ; en conséquence, elle laisse les juges du fond, à l’intérieur de ce cadre conceptuel, souverainement apprécier si telle ou telle réparation rentre dans l’une ou l’autre de ces deux catégories.
En matière d’usufruit, telle n’est manifestement pas l’option choisie par la chambre commerciale, qui s’en tient au texte.