CASS. COM. 12 Juin 2012

Contrairement au Conseil d’Etat statuant en matière d’impôts directs, la Cour de cassation estime que la cession du terrain au preneur en cours de bail à construction n’implique aucun retour des constructions dans le patrimoine du bailleur.

Note :

Selon les principes du droit civil, lorsque le bailleur cède ses droits au preneur, le contrat de bail s’éteint par confusion du fait de la réunion des qualités de bailleur et de preneur sur une seule et même tête, celle du preneur : par la cession du terrain, l’intention des parties est de mettre le preneur en possession de l’ensemble immobilier constitué du sol et des constructions.

Il est impossible de constater à un quelconque moment un retour des constructions dans le patrimoine du bailleur. Celui-ci ne pouvant donc pas les céder lorsqu’il cède le terrain, leur valeur ne doit pas être incluse dans l’assiette des droits d’enregistrement.

La confusion éteint le bail à construction mais elle ne le résilie pas. Par la résiliation, le bailleur récupère la jouissance du terrain ainsi que la propriété des constructions et ce, en vertu de la règle de l’accession, par l’effet de la volonté des parties.

La Cour de cassation a d’ailleurs jugé que par l’effet de la résiliation anticipée du bail, le preneur perd son droit de propriété temporaire sur les constructions et permet au bailleur d’accéder à la propriété des immeubles construits avant l’expiration du bail, ce transfert de propriété des immeubles constituant une mutation soumise aux droits de mutation d’immeuble (Cass. com., 24-6-1997).

En matière d’impôts directs, le Conseil d’Etat a eu plusieurs fois l’occasion de se prononcer sur les conséquences de la cession en cours de bail du terrain au preneur du bail à construction.

Par une jurisprudence constante, il considère que le contrat de cession produit, au regard de la loi fiscale, les mêmes effets qu’une résiliation amiable tacite du bail et doit être regardé comme impliquant la remise des immeubles au bailleur préalablement à la vente. En application des articles 33 bis et 33 ter du CGI, la valeur de ces derniers constitue donc un revenu foncier du bailleur. Cette règle s’applique tant en cas de vente du terrain au preneur (CE, 21-12-2007), qu’en cas d’apport (CE, 5-12-2005) ou d’absorption du bailleur par le preneur (CE, 7-2-2007).

Le Conseil d’Etat a d’ailleurs précisé, dans l’arrêt de 2005, que l’argument selon lequel le bail se serait trouvé éteint, en application des articles 1234 et 1300 du Code civil, par la confusion en la personne du preneur des qualités de bailleur et de preneur, est sans incidence sur l’application des articles 33 bis et 33 ter susvisés.

Le Conseil d’Etat réaffirmait ainsi l’autonomie du droit fiscal. Pour sa part, la Cour de cassation, à défaut de dispositions spécifiques, applique en matière fiscale les principes de droit commun.

Source : FRFL, n° 34/12, page 3