CASS. CIV. 3ème 8 Juillet 2015

Responsabilité contractuelle : désordres esthétiques affectant le sol.

Note de Mme Marie-Laure PAGÈS-de VARENNE :

En l’espèce, un maître d’ouvrage confie en 2000 à une société, la réfection d’un bâtiment existant.

Des désordres étant apparus en 2006 sur le sol du bâtiment, le maître d’ouvrage sollicite une expertise puis assigne au fond l’entreprise en paiement des travaux de reprise.

Sa demande était fondée à titre principal sur le fondement de la responsabilité décennale et subsidiairement sur le fondement de l’article 1147 du Code civil.

La Cour d’appel après avoir écarté la demande sur le fondement de la responsabilité décennale dès lors que la présence de taches dans la chape en l’absence de décollement et de déformation n’occasionnait ni danger ni gêne rejette la demande fondée sur l’article 1147 du Code civil au motif que le demandeur ne démontrait pas la nécessité d’une réfection du sol ni le préjudice dont il sollicitait réparation.

Au visa de l’article 1147 du Code civil, l’arrêt est cassé au motif : « qu’en statuant ainsi alors qu’elle avait constaté que le sol réalisé par la société R. avait une apparence non conforme à ce qui avait été contractuellement prévu et était affecté d’un désordre esthétique, la Cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé le texte susvisé« .

L’absence de caractère décennal d’un désordre ne justifie pas pour autant de voir écartée une demande d’indemnisation au titre des désordres esthétiques.

Les désordres d’ordre esthétique affectant un sol peuvent être réparés sur le fondement de la théorie jurisprudentielle des dommages dits intermédiaires sans pour autant que soit démontrée « la nécessité d’une réfection du sol ou un préjudice justifiant une réparation« .

Exiger une certaine gravité, certes non décennale, pour faire droit à la demande au titre des dommages dits intermédiaires aurait conduit à nier la notion même de désordre esthétique.

Il a été jugé que relevait de la responsabilité contractuelle de droit commun, les désordres esthétiques affectant un revêtement de sol en marbre (Cass. 3e civ., 25 oct. 2009), les désordres affectant les sols carrelés d’un rez-de-chaussée (Cass. 3e civ., 9 juill. 1997) les désordres esthétiques devant être réparés sur le fondement de la responsabilité contractuelle par opposition au désordre de nature décennale (Cass. 3e civ., 25 nov 2014).

Source : Constr.-urb., 9/15, 125