CASS. CIV. 3ème 8 Avril 2014

La prise de possession des lieux ne vaut pas réception tacite si le maître de l’ouvrage démarre son activité pour des impératifs financiers.

Une société, qui envisage d’exploiter une activité de vente dans un immeuble, y fait réaliser des travaux d’électricité.

Pressée de commencer son commerce, elle en débute l’exploitation avant même la réception expresse des travaux et sans avoir payé le solde de la facture.

Trois mois plus tard, un incendie se déclare dans le magasin.

L’assureur du maître de l’ouvrage assigne alors l’assureur du maître d’œuvre, mais il est débouté de ses demandes aux motifs qu’il n’y avait pas eu de réception, même tacite, de l’ouvrage, puisque la société n’avait pas payé intégralement le prix des travaux et qu’il avait pris possession des lieux en raison d’impératifs financiers.

L’assureur forme alors un pourvoi par lequel il soutient, au contraire, que les travaux ont été tacitement reçus et la Cour d’appel a violé l’article 1792-6 du Code civil.

Mais la Cour de cassation rejette cette critique en affirmant que « le maître d’ouvrage, sans avoir payé l’intégralité des travaux, avait décidé, pour des impératifs financiers, de démarrer son activité commerciale alors que restaient à effectuer des travaux de finition et le contrôle de l’installation prévu au contrat […], que la reprise de l’activité commerciale par la société X manifestait davantage le souci du maître d’ouvrage d’éviter des pertes commerciales que son souhait d’accepter les travaux, […] la prise de possession des locaux ne pouvait caractériser une volonté non équivoque de la société X de recevoir les travaux« .

Note :

La réception des travaux est un acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage (C. civ., art. 1792-6, al. 1).

Elle peut être tacite.

La Cour de cassation rappelle ici que la seule prise de possession des lieux ne suffit pas à constituer une réception tacite (Cass. 3e civ., 30 sept. 1998).

En revanche, cette prise de possession vaut réception tacite si les travaux n’ont pas été contestés et que seul le montant du prix a été critiqué (Cass. 3e civ., 16 juill. 1987).

Source : Droit & Patrimoine Hebdo, n° 965, page 2