CASS. CIV. 3ème 7 Décembre 2004

La Société Civile Immobilière Billancourt avait consenti à la société La Belle Bleue un bail portant sur des locaux à usage commercial pour une durée de neuf ans, s’achevant le 31 août 1996.

Le 10 mars 1999, la société locataire avait délivré congé pour le 31 décembre 1999 et avait assigné la bailleresse en restitution du dépôt de garantie. La Cour d’appel avait jugé le congé irrégulier ; l’arrêt sera cassé :

« Vu l’article L. 145-9 du Code de commerce ;

Attendu que, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du Code civil, les baux des locaux soumis aux dispositions du chapitre V du titre IV du livre 1er du Code de commerce ne cessent que par l’effet d’un congé donné suivant les usages locaux et au moins six mois à l’avance ; qu’à défaut de congé, le bail fait par écrit se poursuit par tacite reconduction au-delà du terme fixé par le contrat, conformément à l’article 1738 du Code civil ;

(…) Attendu que pour dire que le congé délivré le 10 mars 1999 est irrégulier et de nul effet et condamner la société La Belle Bleue à payer à la SCI Billancourt une certaine somme au titre des loyers et charges courus de février 2000 au 31 août 2002, l’arrêt retient que le bail a été tacitement reconduit, à l’issue de la période initiale de neuf ans, pour une période de trois ans pour s’achever au 31 août 1999 et que le congé donné le 10 mars 1999 pour le 31 décembre 1999 n’obéit à aucune des règles légales ou contractuelles à défaut pour la société preneuse de justifier de l’accord du bailleur sur ce point ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’à défaut de congé, le bail qui se poursuit est à durée indéterminée et qu’il peut y être mis fin à tout moment par un congé donné suivant les usages locaux et au moins six mois à l’avance, la Cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Note de M. Patrick CHAUVEL :

Cette décision du 7 décembre 2004 reprend un principe bien assuré : un bail commercial « renouvelé par tacite reconduction » peut prendre fin à tout moment par un congé donné suivant les usages locaux et délivré au moins six mois à l’avance (v. not., Cass. 3e civ., 30 juin 1999).

En effet, à défaut de congé valable, un bail soumis au décret du 30 septembre 1953 se poursuit purement et simplement au-delà de la date contractuellement fixée pour son expiration et il n’y a pas formation d’un nouveau contrat (Cass. 3e civ., 18 mars 1998).

Ce contentieux, bien inutile, est né d’une maladresse dans la rédaction de l’article 5 du décret de 1953.

Un bail commercial ne saurait cesser que par l’effet d’un congé.

Lorsque le locataire demeure dans les lieux après le terme initialement prévu, ce qui était le cas en l’espèce, il n’y a pas « tacite reconduction« , mais, en réalité, pure et simple « prolongation » du bail, dont le terme devient indéterminé. L’une ou l’autre des parties peut donc y mettre fin à tout moment.

Source : Droit & Patrimoine, n° 136, page 112