Obstacle à la restitution d’un bien illégalement exproprié.
Note de M. Rémi GRAND :
La réalisation, sur un terrain qui a fait l’objet d’une expropriation privée ultérieurement de base légale, d’installations présentant une utilité publique fait obstacle à la restitution du bien à l’exproprié, juge la Cour de cassation.
En l’espèce, une commune avait exproprié une parcelle appartenant à Mme M. sur laquelle elle avait mené à bien un projet d’agrandissement d’un terrain de sport.
Ayant obtenu l’annulation de la déclaration d’utilité publique et de l’arrêté de cessibilité, Mme M. avait, sur le fondement des dispositions de l’article L. 12-5 du Code de l’expropriation, saisi le juge de l’expropriation pour faire constater ce défaut de base légale et obtenir restitution du bien.
Cette restitution lui avait été refusée une première fois en appel au motif que « les installations, destinées à l’intérêt général, [constituaient] un ouvrage public ne pouvant être démoli« .
Cet argument avait été censuré par la Cour de cassation en ce qu’il ne suffisait pas à caractériser que le bien indûment exproprié n’était pas en état d’être restitué.
Ayant vu sa demande de restitution en nature une nouvelle fois rejeté en appel, Mme M. avait saisi la Cour de cassation qui juge « qu’ayant retenu que le terrain avait été profondément remanié par la construction d’un bâtiment intégrant des vestiaires, un local technique, des sanitaires, une salle de réunion, le tout annexé ou adossé à un terrain de football garni d’une main courante, de cages de but, ledit terrain étant en outre entouré d’un grillage, que ces installations relevaient de l’utilité publique dès lors qu’elles étaient utilisées pour des rencontres scolaires ou des manifestations sportives organisées par la commune, la Cour d’appel, qui a pu en déduire que les exigences de l’intérêt général s’opposaient à la restitution, a légalement justifié sa décision« .
Statuant, ensuite, au visa de l’article R. 12-5-4 du Code de l’expropriation, sur les indemnités dues à la requérante, faute pour elle de pouvoir récupérer son bien, la Cour rappelle que cette indemnisation doit correspondre à la « valeur réelle de l’immeuble au jour de la décision constatant l’absence de restitution, sous la seule déduction de l’indemnité déjà perçue augmentée des intérêts au taux légal« .
Est donc censuré l’arrêt d’appel qui, pour fixer cette indemnité, retient une somme « qui est satisfactoire lorsqu’on la rapporte à celles tirées de ventes de parcelles voisines présentant les mêmes caractéristiques ».