CASS. CIV. 3ème 3 Décembre 2002

Viole les articles 1134 et 1176 du Code Civil la Cour d’Appel qui, pour débouter la promettante de sa demande de paiement de l’indemnité d’immobilisation prévue au contrat de promesse unilatérale de vente suite à l’absence de réalisation, dans les délais prévus, de la condition mise à la charge de la bénéficiaire consistant dans le dépôt d’une demande de permis de construire, reproche à la demanderesse de ne pas avoir exécuté sa propre obligation, seconde dans le temps.

Les juges du fait ne pouvaient pas plus considérer que les parties avaient renoncé à leur engagement en raison de l’absence de mises en demeure réciproques et en conséquence de la vente de l’immeuble à un tiers.

Note de Mme Frédérique COHET-CORDEY :

En application de l’article 1178, on doit constater la caducité d’un avant contrat conclu sous condition suspensive dès lors que cette condition ne s’est pas réalisée dans le délai prévu par contrat. Mais lorsque la réalisation de la condition dépend de l’attitude de l’une des parties au contrat, peut-on avoir égard à l’attitude de l’autre partie afin d’apprécier la caducité de la convention ?

En l’espèce, la bénéficiaire de la promesse devait notamment déposer une demande de permis de construire dans un délai donné tandis que la promettante était tenue de justifier de la levée des inscriptions hypothécaires prises sur l’immeuble objet de leur accord.

En l’absence de dépôt de la demande de permis de construire dans les délais conventionnellement prévus, la promettante a tiré toutes les conclusions résultant pour elle de la caducité de la promesse. Elle s’est ainsi dispensée de l’exécution de son obligation de justification de la levée des inscriptions hypothécaires qui devait intervenir dans un délai postérieur, a vendu son bien à une tierce personne et assigné la bénéficiaire de la promesse en paiement de l’indemnité d’immobilisation prévue au contrat.

S’il est indéniable que les conventions doivent être exécutées de bonne foi, on ne saurait regarder comme déloyal le fait, pour une partie, de ne pas mettre en demeure l’autre partie d’exécuter ses obligations ni de tirer les conséquences d’une absence d’exécution par l’autre de ses obligations.

La non-réalisation de la condition suspensive dans les délais contractuels doit donc permettre à la promettante d’obtenir le versement de l’indemnité d’immobilisation prévue. La solution eût pu être différente si la condition suspensive avait été stipulée dans l’intérêt exclusif de l’acquéreur. Rien de tel ici.

Aussi est-ce la règle de principe qui doit trouver à s’appliquer : la défaillance d’une condition suspensive emporte, de plein droit, caducité de la promesse synallagmatique de vente dont les deux parties peuvent se prévaloir. La stipulation d’une date de réalisation d’une condition ne saurait être regardée comme étant de nature, à compter de la date prévue, à donner au bénéficiaire la possibilité de se dégager en invoquant la défaillance de la condition et au promettant, celle de le sommer de réaliser la vente sans délai afin de faire constater sa carence éventuelle. L’absence de réalisation de la condition dans les délais prévus suffit, à justifier la caducité du contrat de promesse.

Source : AJDI, Octobre 2003 page 701