Opération de défiscalisation : responsabilité de l’intermédiaire spécialisé.
Note de M. Thibault de RAVEL d’ESCAPLON :
Deux époux s’étaient rapprochés de leur conseil en gestion de patrimoine. Ce dernier les avait dirigés vers une société spécialisée, chargée de réaliser une étude personnalisée dans un objectif de défiscalisation. La pratique est habituelle.
Or cette société avait été chargée par un promoteur de commercialiser des logements dans le cadre d’un programme de réhabilitation de l’orangerie d’un château.
Les époux se sont portés acquéreurs d’un appartement. Cependant, loin d’obtenir un dégrèvement, c’est un redressement fiscal qui leur a été notifié par l’administration, les déductions effectuées ayant été remises en cause. Assurément, les acquéreurs avaient été mal conseillés par la société chargée de la mise en place du produit.
De ce point de vue, la Cour de cassation approuve le raisonnement des premiers juges.
En effet, cette société, en tant qu’intermédiaire spécialisé, ne pouvait ignorer qu’il existait une différence entre les travaux d’amélioration et les travaux de reconstruction, seuls les premiers étant éligibles aux déductions fiscales.
De même, ces travaux ne pouvaient débuter avant la fin de la commercialisation et la constitution d’un syndicat de copropriété. Enfin, la société avait fait réaliser une étude préalable.
Elle savait donc que les travaux étaient importants de sorte qu’il y aurait nécessairement un long délai avant la mise en location et donc avant la possibilité de déduire.
En bref, nombreux étaient les obstacles dont était au courant la société spécialisée.
Dès lors, elle avait commis une faute ayant un lien direct avec le préjudice constitué par l’échec de la défiscalisation proposée.
La faute était de nature délictuelle, dans la mesure où les acquéreurs n’avaient contracté qu’avec le seul promoteur.
Il est certain que si les époux avaient eux-mêmes connu ces éléments, et notamment l’ensemble de ces circonstances qui compromettaient sérieusement la bonne fin de la défiscalisation, ils n’auraient pas contracté.
Et l’on comprend donc que pèse progressivement sur les sociétés intermédiaires, dans ce type de placement, une véritable obligation de conseil, se muant nécessairement en obligation de déconseiller lorsque le succès fiscal du placement est douteux.
À tout le moins sont-elles débitrices d’une obligation de sincérité qui les contraint à dévoiler l’ensemble des renseignements dont elles disposent.