CASS. CIV. 3ème 25 Mars 2015

Mur mitoyen et interdiction de toute ouverture.

Note de M. Christophe SIZAIRE :

Un mur mitoyen séparait deux fonds. L’un des voisins a installé en haut du mur, à 7 mètres de hauteur, deux châssis à volets soufflants, opaques, destinés à assurer la ventilation de son local. L’autre voisin a alors demandé la suppression de ces ouvertures sur le fondement de l’article 675 du Code civil.

La Cour d’appel a débouté le requérant au motif que même si les conditions légales de l’article 675 n’étaient pas respectées, les châssis pouvaient être conservés dès lors que ceux-ci n’étaient pas constitutifs d’une vue et qu’ils assuraient une garantie de discrétion suffisante sur le fonds voisin.

Sur le visa de l’article 675 du Code civil, cette décision a été censurée par la Cour de cassation selon la motivation suivante :

« Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que le mur est mitoyen mais que l’installation de M. et Mme Y garantit une discrétion suffisante ;

Qu’en statuant ainsi, tout en constatant que l’installation constituée de châssis basculants réalisait une ouverture prohibée par l’article 675 du Code civil, la Cour d’appel a violé ce texte« .

Par application des dispositions de l’article 675 : « l’un des voisins ne peut, sans le consentement de l’autre, pratiquer dans le mur mitoyen aucune fenêtre ou ouverture en quelque manière que ce soit, même à verre dormant« .

Cet article prohibe ainsi la réalisation de toute ouverture dans un mur mitoyen que celle-ci soit ou non constitutive d’une vue sur le fonds voisin.

Le principe s’applique ainsi à la création de fenêtres, de portes, ou encore de châssis fixes ou ouvrants, même si ceux-ci sont constitutifs de simples jours de souffrance.

Dans ces conditions, le régime juridique est plus sévère que si le mur était privatif à l’auteur de l’ouverture puisque celui-ci, même en limite de propriété, peut y établir des jours de souffrance.

L’interdiction de pratiquer dans le mur mitoyen une ouverture souffre plusieurs exceptions :

– le percement de cette ouverture peut résulter d’un accord entre les parties, dont la preuve peut être apportée par tous moyens ;

– si l’ouverture est constitutive d’une vue, le voisin ayant pratiqué l’ouverture peut revendiquer une prescription trentenaire en s’appuyant sur une possession utile (Cass. 3e civ., 10 avr. 1975 – CA Nîmes, 16 mai 2006 – CA Grenoble, 12 févr. 2007). Cette jurisprudence ne s’applique pas lorsque l’ouverture est constitutive d’un simple jour de souffrance puisqu’il ne peut y avoir d’acquisition par usucapion de servitude dans cette hypothèse.

Source : Constr-urb., 6/15, page 90