Le maître de l’ouvrage qui a indemnisé les voisins victimes des troubles anormaux de voisinage est subrogé pour le tout contre les constructeurs, auteurs des nuisances.
Note de Mme Elodie GAVIN-MILLAN :
La jurisprudence construit progressivement la théorie des troubles anormaux de voisinage en précisant, cette fois, les modalités de contribution à la dette de voisinage.
Le maître de l’ouvrage condamné sur le fondement des troubles de voisinage peut se retourner contre le constructeur responsable, soit avant paiement, sur le fondement contractuel, à condition de rapporter la preuve de sa faute dans l’exécution du contrat qui les unit, soit après paiement, sur le fondement délictuel, par subrogation dans les droits des victimes indemnisées.
L’arrêt de la Cour de cassation du 22 juin 2005 apporte des précisions sur le recours subrogatoire du maître de l’ouvrage.
La société Duminvest, chargée de la gestion du projet de rénovation de l’hôtel George V, et la société Bouygues Bâtiment, entrepreneur ayant exécuté les travaux, avaient été condamnées in solidum avec le maître de l’ouvrage, la société George V, à réparer les dommages subis par les immeubles voisins du fait des nuisances que les travaux avaient occasionnées, puis à relever et garantir le maître d’ouvrage de toutes les condamnations prononcées contre lui.
La société Duminvest reprochait à la Cour d’appel de l’avoir condamnée in solidum avec le maître d’ouvrage bien qu’aucune relation stable de voisinage n’ait jamais existé entre elle et les voisins demandeurs et qu’elle avait seulement été chargée par le propriétaire d’une mission temporaire de rénovation de son immeuble.
Les sociétés Duminvest et Bouygues entendaient également contester leur condamnation à garantir totalement la société George V, maître de l’ouvrage, alors selon elles, que n’était rapportée aucune preuve tenant d’abord à l’inexécution de leur engagement contractuel, ensuite à un engagement spécial destiné à garantir le maître d’ouvrage contre toute condamnation et enfin, à un défaut d’information sur les risques de troubles voisins.
La Cour de cassation a rejeté le premier moyen du pourvoi après avoir décidé que le propriétaire de l’immeuble auteur des nuisances et les constructeurs à l’origine de celles-ci, devaient être condamnés ensemble sur le fondement de la prohibition du trouble anormal de voisinage, dans la mesure où les constructeurs sont pendant le chantier « les voisins occasionnels des propriétaires lésés« .
Elle a également rejeté le second moyen au motif que le maître de l’ouvrage qui avait exécuté le jugement et payé les dédommagements accordés aux voisins était fondé à obtenir la garantie totale des locateurs d’ouvrage auteurs du trouble.