Le maître d’œuvre peut-il ignorer l’état du sol ?
Note de M. Bernard BOUBLI :
En l’espèce le propriétaire d’une parcelle confie l’installation d’une fosse septique à une entreprise spécialisée qui, lors des travaux de terrassement, endommage une canalisation en sous-sol appartenant à la société C.
Celle-ci assigne le maître de l’ouvrage ; elle est déboutée par la juridiction de proximité qui estime que l’opération a été confiée à un constructeur qui en assurait la maîtrise d’œuvre et qu’il appartenait à ce dernier de s’informer sur d’éventuels ouvrages en sous-sol.
Cassation fondée sur les dispositions de l’article 4 du décret du 4 octobre 1991 : l’obligation de renseignement édictée par ce texte pèse sur le maître de l’ouvrage même s’il a confié la maîtrise d’œuvre à un tiers.
La condamnation du maître de l’ouvrage à l’égard d’un tiers, pour des faits qui lui sont imputables ou qui sont commis par la personne qu’il s’est substituée, est normale.
L’obligation mise à la charge du maître de l’ouvrage qui confie à un professionnel qualifié, de surcroît investi (selon l’arrêt) de la maîtrise d’œuvre, de se renseigner sur l’état du sol est une option moins évidente.
Le décret du 4 octobre 1991 concerne l’exécution de travaux à proximité de certains ouvrages souterrains, aériens ou subaquatiques de transport ou de distribution d’eau ou d’énergie.
L’article 4 oblige celui qui envisage de réaliser certains travaux en sous-sol à se renseigner auprès de la mairie de la commune sur l’existence de zones d’implantation des ouvrages de transport (liquides, produits chimiques, gaz, etc.).
Il précise dans son alinéa 3 que la demande de renseignements « doit être faite par le maître de l’ouvrage ou le maître d’œuvre s’il en existe un« .
Or l’entreprise était chargée de la maîtrise d’œuvre.
N’assumait-elle pas l’obligation de se renseigner, alors que le maître de l’ouvrage qui fait installer une fosse septique est souvent un profane qui, lorsqu’il s’adresse à un professionnel, s’attend à ce qu’il réalise un ouvrage conforme à la réglementation applicable ?
L’arrêt s’inscrit dans une jurisprudence qui, pour les études de sol, est étonnamment indulgente pour le maître d’œuvre.