CASS. CIV. 3ème 2 Février 2005

Acceptation d’un sous-traitant par le maître de l’ouvrage.

L’entrepreneur principal qui souhaite exécuter un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit faire accepter chacun d’eux et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l’ouvrage (Loi du 31-12-1975 art. 3).

Une entreprise, pressentie par l’entrepreneur principal pour l’exécution d’un lot en sous-traitance puis écartée par le maître de l’ouvrage, avait demandé que ce dernier soit condamné à lui verser des dommages-intérêts pour refus d’agrément abusif.

Pour rejeter cette demande, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence avait retenu que le droit, pour le maître de l’ouvrage, de refuser d’accepter un sous-traitant est un droit discrétionnaire dont l’exercice ne peut pas faire l’objet de contrôle juridictionnel hormis le cas, non invoqué en l’espèce, de collusion frauduleuse entre le maître de l’ouvrage et l’entrepreneur principal.

La Cour de cassation a censuré cette décision car la Cour d’appel aurait dû rechercher, comme il le lui était demandé, si les motifs du refus, dont le caractère discrétionnaire est limité par un éventuel abus de droit, n’étaient pas fallacieux et « fabriqués » avec des moyens frauduleux.

Note :

Le maître de l’ouvrage n’est pas tenu d’accepter le sous-traitant et d’agréer ses conditions de paiement (Cass. 3e civ. 3-2-1999).

Mais, ainsi que l’a jugé la Cour d’appel de Paris, si le droit pour le maître de l’ouvrage de refuser l’agrément d’un sous-traitant est discrétionnaire, il ne doit pas être exercé de façon abusive (CA Paris 25-3-1993).

Au cas particulier, elle avait estimé que le refus fondé sur le défaut de qualification du sous-traitant n’était pas abusif et précisé qu’en cas d’agrément ultérieur d’un sous-traitant aussi peu qualifié, la responsabilité de l’entrepreneur principal ne pouvait être retenue que s’il y avait eu collusion entre lui et le maître d’ouvrage amenant ce dernier à commettre un abus de droit.

La Cour d’appel de Paris avait en outre jugé que le droit de refuser l’agrément n’a pas à être motivé.

Confirmant cette solution, la Cour de cassation précise que dans le cas où, comme en l’espèce, le refus est motivé, les juges du fond doivent, lorsqu’ils y sont invités, rechercher si les motifs invoqués ne sont pas de nature à établir l’existence d’un abus de droit.

Source : BRDA, 5/05, page 7