CASS. CIV. 3ème 13 Novembre 2003

Le vendeur d’un immeuble ayant agi en qualité de marchand de biens ne peut prétendre ignorer les vices de la chose vendue.

Il doit en conséquence indemniser les acquéreurs du préjudice qui en est résulté.

Note de Mme Frédérique COHET-CORDEY :

Si l’article 1645 du Code civil suggère aux acquéreurs ayant soufferts des vices de la chose acquise, de rapporter la preuve de la connaissance de ces vices par le vendeur au jour de la vente, la jurisprudence retient, de manière constante depuis une cinquante d’années un renversement de la charge de la preuve lorsque le vendeur est un professionnel.

Dans cet arrêt du 13 novembre 2003, la Cour de cassation n’infléchit pas sa position à l’égard des vendeurs professionnels.

Elle rappelle, en rejetant toute l’argumentation du vendeur, ce qui est désormais une évidence : le vendeur « ne pouvait, en tant que marchand de biens, prétendre ignorer les vices de la chose vendue« .

Il est présumé, de manière irréfragable, connaître les vices de la chose qu’il vend ès-qualités.

Il est alors « tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur« .

Le marchand de biens qui acquiert une maison d’habitation par adjudication avant de la revendre, ne peut donc se dégager de cette obligation de réparation alors même qu’il n’a ni compétence particulière relativement aux vices dénoncés (au cas présent, de graves défauts de la charpente et de la couverture), que ces derniers étaient difficilement décelables et que les acquéreurs avaient fait intervenir, avant la vente, un organisme professionnel qui n’avait rien décelé d’anormal.

La solution est claire : il ne peut établir son absence de connaissance des vices de l’immeuble au jour de la vente.

Sa seule qualité de marchand de biens suffit à présumer sa mauvaise foi, sans que les juges du fond n’aient à vérifier la réalité de la fiction jurisprudentielle.

Cette présomption de connaissance qui pèse sur le vendeur professionnel est aggravée en ce sens qu’elle est plus lourde que celle qui pèse sur l’acquéreur professionnel, de même spécialité que le vendeur.

Un tel acquéreur peut, en effet, démontrer qu’il n’a pas eu connaissance du vice atteignant la chose vendue en établissant que celui-ci était indécelable.

Mais, à égalité de compétences avec son acquéreur, le vendeur n’a pas cette faculté.

Il ne peut échapper à sa responsabilité aggravée en démontrant le caractère indécelable du vice invoqué par son acquéreur.

Source : AJDI, Octobre 2004, page 748