Indépendance de la sanction des règles d’urbanisme et des troubles de voisinage.
Note de M. Patrice CORNILLE :
Dans les lotissements, les relations entre les colotis voisins sont régies par le cahier des charges.
En cela, l’action en violation d’un cahier des charges est différente de celle visant à condamner un inconvénient anormal de voisinage même si, souvent, elles se conjuguent.
En effet, alors que la seconde ne peut prospérer que si le demandeur administre la preuve d’un dommage personnel, la première n’exige pas la preuve d’un préjudice, encore moins la preuve de son anormalité.
La Cour de cassation juge en effet avec constance que chaque coloti est fondé à demander le respect du cahier des charges du lotissement sans avoir à justifier d’un préjudice.
Un règlement de lotissement peut aussi interagir avec les troubles de voisinage. Un règlement de lotissement est une collection de règles d’urbanisme.
La violation de l’une de ces règles peut parfaitement suffire, mais à la condition que le préjudice et le lien de causalité soient établis, à justifier la démolition de la construction ou des dommages intérêts à la demande du voisin.
Et ce dernier peut être un coloti ou non, ce qui est une autre différence avec la sanction du cahier des charges, qui ne peut être invoqué que par un coloti.
En cas de violation de la règle d’urbanisme, la jurisprudence exige la preuve d’un préjudice personnel par le demandeur, lequel doit justifier d’un « trouble à un droit susceptible de possession« .
Se prévaloir des prérogatives résultant de la seule existence et de la seule violation des règles d’urbanisme ne suffit pas. Le plaignant doit donc justifier d’un préjudice, mais celui-ci peut être ou non un trouble anormal de voisinage.
Il n’a nullement à faire la preuve de l’anormalité du trouble qu’il subit pour obtenir la sanction de la violation de la règle pourvu qu’elle lui cause préjudice.
Il avait déjà été jugé que la Cour d’appel qui constate que la violation d’une servitude d’urbanisme cause à un voisin un préjudice personnel n’a pas à rechercher, pour condamner l’auteur de l’infraction à réparation, si ce préjudice excède les inconvénients normaux de voisinage.
Il y a donc une parfaite indépendance juridique entre le cahier des charges, le règlement du lotissement et les troubles de voisinage.
L’avantage est que, quel que soit le document sur la violation duquel il se fonde, le voisin demandeur n’a pas à prouver l’anormalité du trouble qu’il subit, et n’a même pas à prouver son trouble s’il se fonde sur le cahier.