CASS. CIV. 3è, 31 mai 2000

Cassation, pour défaut de base légale au regard de l’article 1382 C. civ., de l’arrêt qui, pour ordonner d’aveugler la fenêtre d’une tour ayant une vue droite sur le fonds voisin, retient que le permis de construire de la tour a été jugé illégal, sans rechercher l’existence d’un lien de causalité entre la construction illégale et le dommage.

Note de M. CORNILLE :

Voici une solution qui, bien qu’elle soit parfaitement juridique, risque de surprendre.

Le plaignant avait obtenu, par jugement préalable d’un tribunal administratif, que le permis de construire d’une tour de 12 m de hauteur construite par son voisin soit jugé illégal au regard de l’article R.111-18 C. urb. La hauteur de la tour était en effet excessive par rapport aux règles de prospects sur la voie publique (alignement) que prévoit cet article (V. aussi CCH, art. L.112-1).

Agissant ensuite devant le juge judiciaire, et se prévalant de l’illégalité du permis de construire, il obtient que son voisin soit condamné à aveugler par un verre translucide la fenêtre ouverte au premier étage de la tour et qui créait une vue droite sur sa propriété. L’arrêt d’appel est fort justement cassé : le préjudice n’est pas en relation directe de cause à effet avec la faute démontrée. Le dommage consistant à subir une vue irrégulière découle en effet de la faute consistant à aménager une fenêtre sans respecter les articles 675 et suivants du Code Civil, c’est à dire notamment sans le consentement préalable du voisin ; le préjudice ne résulte pas directement de la faute consistant pour celui qui aménage la fenêtre à le faire en vertu d’un permis déclaré illégal au regard de l’article R.111-18 C. urb.

Cela signifie que les règles de prospects que doivent respecter les constructeurs en vertu du texte concerné n’ont pas pour fonction de protéger les voisins des regards et jets d’objets pouvant provenir des constructions nouvellement autorisées. L’article R.111-18 C. urb., fixe des règles de prospect par rapport aux voies publiques et, par extension, par rapport aux voies privées, qui paraissent plutôt motivées par des impératifs de sécurité touchant à la circulation sur lesdites voies.

Source : Construction-Urbanisme, novembre 2000 page 15