CASS. CIV. 3è, 29 mars 2000

Est engagée vis à vis des acquéreurs et des établissements prêteurs, la responsabilité de l’architecte qui a attesté le « hors d’eau » alors que l’ouvrage est affecté de malfaçons le rendant impropre à son utilisation.

Note de M. Daniel SIZAIRE :

Dans une opération ayant fait l’objet de ventes en l’état futur d’achèvement, la responsabilité de l’architecte a été retenue pour le préjudice subi par les acquéreurs et les banques qui avaient consenti au vendeur des crédits destinés au financement de l’opération, résultant de l’établissement d’attestations de travaux ne correspondant pas la réalité. En fonction de ce prétendu avancement des travaux, des versements avaient été effectués et, plus spécialement, par les banques, conformément à l’échelonnement de l’article R.261-14 CCH qui prévoit certains plafonds : 35 % à l’achèvement des fondations, 70 % à la mise hors d’eau etc, sur présentation de ces attestations à l’entrepreneur principal lequel avait été placé, de même que le vendeur, en liquidation judiciaire. On apprécie le dommage pour les acquéreurs et les prêteurs résultant de versements ne tenant pas compte de l’état réel d’avancement des travaux. Sur le principe, que la responsabilité, pour faute, de l’architecte est retenue ne surprendra pas.

Cependant, le cas d’espèce, qui portait essentiellement sur le stade de la « mise hors d’eau », mérite de s’y arrêter. En effet, au moment de l’attestation litigieuse, la toiture de l’immeuble était construite.

Cependant, à la suite d’une expertise ultérieure, l’expert a estimé que le tracé de la charpente n’était pas conforme aux plans établis par la demande de permis de construire, que cette charpente et la toiture n’étaient pas conformes aux règles de l’art et pouvaient rendre, à terme, le bâtiment impropre à sa destination, et a conclu, qu’à son avis, il lui paraissait que, pour qu’une telle attestation soit justifiée, il fallait que les ouvrages soient conformes aux documents contractuels et en l’état d’être réceptionnés sans réserve fondamentale. La CA a suivi et la 3è chambre a rejeté le pourvoi.

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Il faut faire la part des choses. Toute non-conformité ou malfaçon ne fait pas obstacle à la constatation des différents stades de construction, à commencer par l’achèvement de l’immeuble.

Il reste que l’architecte ou autre auquel est confiée la mission d’attester les différents stades de construction, ne peut se contenter d’une simple constatation extérieure mais doit apprécier si, à tel ou tel stade – en l’occurrence « la mise hors d’eau » – il n’existe pas des défauts de conformité ou des malfaçons tels qu’ils ne permettent pas de considérer ce stade atteint.

Source : CONSTRUCTION-URBANISME, août 2000 page10