Le délai de l’article 42, alinéa 2 de la loi ne s’applique pas aux actions relatives aux clauses réputées non écrites.
Note de M. SIZAIRE : C’est là un revirement de jurisprudence considérable, à l’occasion d’une répartition irrégulière de charges votée par l’assemblée.
1. On sait qu’aux termes de l’article 42, alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 :
« les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions faite à la diligence du syndic. »
Sont visées toutes les actions en annulation des décisions de l’assemblée, tant en raison d’une nullité de forme que de fond. L’intention du législateur a été de donner une portée large à l’exclusion résultant du deuxième alinéa de l’article 42 de la loi (V. exposé de motifs, p. 8, aux termes duquel sont visées les demandes en annulation, même pour illégalité). La jurisprudence s’est prononcée en ce sens. L’expiration du délai de deux mois après notification a un effet absolu, même si la décision adoptée par l’assemblée est contraire aux dispositions impératives de la loi (Cass. 3è civ., 19 juin 1973 – Cass. 3è civ., 17 juillet 1991).
L’arrêt rapporté prend le contre-pied.
En l’espèce, des lots situés au rez de chaussée avaient fait l’objet d’une subdivision à l’occasion de laquelle le propriétaire de ces lots avait contesté une participation aux charges d’ascenseur ayant fait l’objet d’une décision de l’assemblée générale des copropriétaires.
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La Cour d’appel avait déclaré prescrite l’action du copropriétaire au motif que si la répartition des charges spéciales d’ascenseur dont était affectés les lots originels n’était pas conforme aux dispositions de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 – d’où il résulte que cet équipement n’a pas en principe d’utilité pour des locaux situés au rez de chaussée – c’était une nouvelle répartition des charges qui avait été votée par l’assemblée générale et que cette décision n’avait pas été contestée dans les deux mois de sa notification ainsi que l’exige l’article42 de la loi.
La 3ème chambre civile casse et annule, au visa de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble les articles 10 et 42 de la même loi, au motif :
« Attendu que toutes clauses contraires aux dispositions des articles 6 à 37, 42 et 46 et celles du règlement d’administration publique prises pour leur application sont réputées non écrites ;
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Attendu que pour déclarer prescrite l’action de la SCI relative à la répartition des charges spéciales d’ascenseur pour les lots 95 à 103 de la copropriété, l’arrêt retient que la répartition des charges spéciales d’ascenseur dont étaient affectés les lots originels n’était pas conforme aux dispositions d’ordre public de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965, mais que la SCI n’a jamais contesté ces stipulations du règlement de copropriété, que c’est une nouvelle répartition qui a été votée par l’assemblée générale du 15 juin 1993 et que cette décision n’a pas été contestée dans les deux mois de sa notification ainsi que l’exige l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que la décision de l’assemblée générale était contraire aux critères posés par l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 en matière de répartition des charges et alors que le délai prévu par l’article 42, alinéa 2 de cette loi, ne s’applique pas aux actions relatives aux clauses réputées non écrites, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
En d’autres termes, appliquée à une clause contraire à l’article 10 (charges) et au visa de l’article 43 de la loi, il résulte de l’arrêt que la forclusion du deuxième alinéa de l’article 42 ne fait pas obstacle à la contestation d’une décision de l’assemblée ayant un effet contraire aux articles 6 à 37, 42 et 46 de la loi du 10 juillet 1965.
2. Que la forclusion de deux mois à compter de la notification de la décision couvre n’importe quelle irrégularité n’est pas satisfaisant il est vrai sur le plan des principes.
Encore plus regrettable au plan pratique du fonctionnement d’une copropriété, est l’utilisation extrêmement limitée par les tribunaux de la forclusion de l’article 42, alinéa 2, s’agissant de manquements essentiellement formels.
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C’est le cas tout particulièrement des irrégularités de convocation de l’assemblée (Cass. 3è civ., 14 juin 1984 – 17 avril 1991 – 22 juin 1994), susceptibles lorsqu’il s’agit de la nomination du syndic de se répercuter en chaîne, par la suite, affectant gravement la gestion de l’immeuble (Cass. 3è civ., 7 juillet 1999).
Il en résulte une grande insécurité. Il apparaît absolument nécessaire que, dans un but de régularisation, les assemblées de copropriétaires puissent être tenues sans devoir passer par la complication, les frais et les incidents d’une administration judiciaire. Il suffirait de revoir, à cet égard, les articles 7 et 8 du décret du 17 mars 1967.
La généralisation de l’arrêt rapporté irait bien au-delà : elle ne pourrait avoir pour effet que l’insécurité absolue.