CASS. CIV. 3e, 27 mars 2002

Des propriétaires de locaux à usage commercial ont renouvelé un bail commercial au profit d’un locataire qui a souscrit, au cours du bail renouvelé, un contrat de franchise.

A l’expiration du bail, le bailleur a notifié un congé avec refus de renouvellement et offre d’une indemnité d’éviction.

La cour d’appel a exactement décidé que les preneurs étaient en droit de réclamer le paiement d’une indemnité d’éviction, dès lors qu’elle a relevé, à bon droit, d’une part, que si une clientèle est au plan national attachée à la notoriété de la marque du franchiseur, la clientèle locale n’existe que par le fait des moyens mis en œuvre par le franchisé, parmi lesquels les éléments corporels de son fonds de commerce, matériel et stock, et l’élément incorporel que constitue le bail, que cette clientèle fait elle-même partie du fonds de commerce du franchisé puisque, même si celui-ci n’est pas le propriétaire de la marque et de l’enseigne mis à sa disposition pendant l’exécution du contrat de franchise, elle est créée par son activité, avec des moyens que, contractant à titre personnel avec ses fournisseurs ou prêteurs de deniers, il met en œuvre à ses risques et périls ; d’autre part, que le franchiseur reconnaît aux franchisés le droit de disposer des éléments constitutifs de leur fonds.

Note de Mme Françoise AUQUE :

Le franchisé bénéficie-t-il du statut des baux commerciaux ?

Pour la première fois, la Cour de cassation répond à cette question qui, depuis quelques années, divisait les juges du fond.

Elle le fait, non pas de manière solennelle, au visa d’un grand texte, par l’énoncé d’une règle de droit dont la concision révélerait immédiatement la solution générale, mais par un arrêt de rejet, reprenant partiellement la motivation d’une cour d’appel, qui avait reconnu à des commerçants, exploitant sous l’enseigne Conforama, le droit à indemnité d’éviction.

Ni les faits, ni la procédure de cette espèce ne se prêtaient à une décision de principe.

Une société bénéficiant d’un bail commercial renouvelé en 1979, avait souscrit un contrat de franchise en 1986.

A l’arrivée du terme du bail, les propriétaires délivrèrent congé avec refus de renouvellement, sans se préoccuper, à l’époque, de la qualité de leur locataire.

Ce n’est que plus tard, probablement sous l’influence de décisions de juges du fond relatives aux conditions du droit au statut des franchisés ou concessionnaires, et à la publicité qui leur fut donnée, que les bailleurs s’opposèrent à la demande de paiement d’indemnité d’éviction formée par les époux Basquet, venus aux droits de la société franchisée, prétendant, notamment, que ces derniers ne justifiaient pas d’une clientèle liée à leur activité, et que seules les opérations d’expertise avaient permis de révéler le contenu du contrat de franchise.

Source : JCPN 2002 n° 42 page 1465