Une servitude ne peut conférer le droit d’empiéter sur la propriété d’autrui.
Note de M. Jean-Louis BERGEL :
L’arrêt ci-dessus est manifestement un nouvel arrêt de principe sur la notion de servitude.
Cassant pour violation de la loi un arrêt de la cour d’appel d’Angers au visa des articles 544 et 637 du code civil, après un rappel des définitions respectives de la propriété et des servitudes, il s’achève par la proclamation d’un principe : « une servitude ne peut conférer le droit d’empiéter sur la propriété d’autrui ».
On ne manquera pas de le rapprocher d’un précédent arrêt du 24 mai 2000 rendu dans les mêmes termes et sur le même fondement selon lequel « une servitude ne peut être constituée par un droit exclusif interdisant au propriétaire du fonds servant toute jouissance de sa propriété ».
Ainsi, bien que l’article 686 du code civil permette aux propriétaires d’établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, « telles servitudes que bon leur semple », leur liberté n’est pas sans limites : elle est subordonnée au respect de la définition même des servitudes qu’elle n’autorise pas à dénaturer.
Une servitude n’est qu’une « charge » grevant le fonds servant.
Elle n’en est ni une aliénation, ni une expropriation.
Elle ne peut conférer sur celui-ci ni un droit de jouissance exclusif, ni un droit d’empiètement.
C’est un démembrement de la propriété.
Ce n’est pas un transfert de propriété au profit du fonds dominant.
La constitution de servitude n’est qu’une technique de transfert d’une utilité réelle d’un fonds à un autre par laquelle on reporte certaines prérogatives inhérentes à la propriété du fonds servant au profit du fonds dominant qui se trouve ainsi doté d’une qualité supplémentaire, ce qui correspond d’ailleurs à un report de valeur économique consistant en une moins-value de l’un et une plus-value de l’autre.