CASS. CIV. 3è, 24 novembre 1999

L’article 1622 du Code Civil est applicable à la vente en l’état futur d’achèvement sous réserve de faire courir le délai préfix d’un an à compter du transfert de la propriété, constaté par la livraison.

Note de M. SIZAIRE : Selon l’article 1622 du Code Civil :

« l’action en supplément de prix de la part du vendeur, et celle en diminution du prix ou en résiliation du contrat de la part de l’acquéreur, doivent être intentées dans l’année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance »

L’espèce portait sur la vente en l’état futur d’achèvement de six bâtiments à usage de bureaux avec une définition des surfaces prévoyant une tolérance de déficit de 2 %, pour un prix « global, forfaitaire et définitif » mais avec une clause dite d’ajustement éventuel du prix si à la livraison le seuil de tolérance était dépassé, étant donné à l’acquéreur un délai de trois mois à la livraison pour faire procéder à un mesurage des surfaces. C’est ce qui avait été fait fin 1992. Mais l’acquéreur n’avait assigné le vendeur au titre de l’ajustement du prix que fin 1996. La CA avait déclaré irrecevable cette action au motif que si la vente d’immeuble à construire fait l’objet d’une législation autonome, aucune de ces dispositions ne vise l’action fondée sur le défaut de contenance et ne vient déroger aux règles générales du Code Civil, sur ce point, qui ont vocation à lui être appliquées ; que le point de départ du délai de l’article 1622 peut être adapté à une situation originale s’il respecte les conditions essentielles d’application du texte ; que retenir comme point de départ du délai le transfert de la propriété complète de l’immeuble à l’achèvement n’est que l’adaptation du texte de l’article 1622 à la spécificité de la vente en l’état futur d’achèvement dans la mesure où l’acquéreur de l’immeuble à construire se trouve placé dans la même situation que l’acquéreur de l’immeuble existant ; qu’il y a donc lieu de faire partir le délai édicté par l’article 1622 du Code Civil, à compter du transfert effectif de la propriété, constaté par la livraison, que l’action engagée par l’acquéreur entre bien dans le cadre des articles 1617 et suivants du Code Civil, et qu’aucune disposition conventionnelle ne vient déroger aux règles générales sur l’action en révision de prix et son délai.

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Le pourvoi faisait valoir d’une part que les dispositions des articles 1617 à 1622 du Code Civil ne sont pas applicables dès lors qu’il s’agit, non de l’obligation de délivrance incombant au vendeur d’immeuble, mais de l’obligation du vendeur d’édifier un immeuble d’une superficie déterminée au contrat.

Le pourvoi faisait valoir d’autre part que s’agissant non de l’obligation de délivrance incombant au vendeur, mais de l’exécution d’une convention particulière intervenue entre les parties, le délai de l’article 1622 du Code Civil n’était pas applicable.

Le moyen dans ces deux branches est rejeté par le présent arrêt aux motifs suivants :

« attendu d’une part, que la cour d’appel a retenu à bon droit, que l’article 1622 du Code civil était applicable à la vente en l’état futur d’achèvement sous réserve de faire courir le délai préfix d’un an à compter du transfert de propriété, constaté par la livraison ;
attendu, d’autre part, que la cour d’appel a retenu par une interprétation souveraine des termes de l’acte de vente que leur imprécision rendait nécessaire, qu’aucune stipulation ne venait déroger aux règles générales sur l’action en révision de prix et son délai, la clause d’ajustement de prix ne pouvant être analysée que comme un aménagement des modalités de la garantie de l’acquéreur. »

L’intérêt de l’arrêt ici rapporté est d’une part de bien faire la distinction entre des conventions ayant pour objet la construction et la remise de locaux et la vente d’immeuble à construire qui, bien que comportant un engagement de construire, reste une vente de sorte que la question de la superficie relève de l’obligation de délivrance incombant au vendeur en tant que tel, et d’autre part d’admettre par voie de conséquence, que les dispositions des articles 1617 et suivants du Code Civil, sont susceptibles de s’appliquer à la vente d’immeuble à construire ne faisant courir le délai d’action d’un an à compter de la livraison.

Ces dispositions peuvent ainsi qu’il résulte de l’arrêt, faire l’objet de conventions au titre d’un aménagement des modalités de la garantie de l’acquéreur.

A défaut de stipulations venant y déroger, les règles générales du Code Civil relatives à la consistance doivent s’appliquer.

Source : Construction-Urbanisme, janvier 2000, page 10