L’assureur dommages-ouvrage ne peut exciper de la nullité des ventes et de son caractère rétroactif pour réclamer le remboursement, par les propriétaires, des sommes versées.
Note de M. PERINET-MARQUET :
L’arrêt est important, même s’il se réfère à une situation que l’on peut espérer rare. A la suite de la construction de huit pavillons, de graves désordres apparaissent. Deux actions sont menées parallèlement. L’une auprès de l’assureur dommages-ouvrage, qui est condamné par le juge des référés à verser une provision au profit des acquéreurs, ce qu’il fait. L’autre, à l’encontre du vendeur, qui aboutit, postérieurement, à l’annulation des ventes. L’assureur dommages-ouvrage soutient alors que les indemnités versées aux acquéreurs n’ont plus lieu d’être et qu’elles doivent lui être restituées sur le fondement, notamment, de la répétition de l’indu. Cette demande, rejetée en première instance, n’est pas davantage acceptée par la Cour de cassation.
L’assurance dommages-ouvrage est une assurance de chose qui garantit l’ouvrage dans quelque patrimoine qu’il se trouve. L’action peut donc être mise en œuvre, valablement, par toute personne propriétaire de l’immeuble au moment de la survenance de ces désordres. Le but de l’indemnité est la reprise des désordres et même si, compte tenu du sacro-saint principe indemnitaire en assurance, aucune obligation d’affecter cette somme à la réparation effective des désordres n’existe, il n’en demeure pas moins que l’indemnisation doit rester dans le patrimoine du maître d’ouvrage ou des acquéreurs successifs. L’annulation de la vente n’ayant aucun impact sur la réalité des désordres et sur l’obligation de l’assureur dommages-ouvrage, assureur de chose, d’avoir à les réparer, celui-ci est donc mal placé pour demander la restitution des indemnités qu’il a versées.
Il n’en demeure pas moins que ces indemnités, même si elles n’ont pas encore été employées à la réparation de l’immeuble, ne font plus partie du patrimoine des acquéreurs de la construction. La nullité de la vente les fait rétroactivement revenir, comme l’indique la Cour de cassation, dans le patrimoine de la S.C.I. venderesse. Ainsi les restitutions, si elles doivent avoir lieu, se feront entre les patrimoines des parties à la vente et ne bénéficieront pas à l’assureur dommages-ouvrage.