CASS. CIV. 3è, 21 novembre 2000 CASS. CIV. 3è, 22 novembre 2000

Viole l’article 1134 du Code Civil une Cour d’appel qui retient que l’activité de restauration est interdite par le règlement de copropriété, par des motifs dont il ne résulte pas que l’activité de restaurant était précisément interdite par le règlement de copropriété en dérogation du principe de la liberté des activités commerciales (1ère espèce). C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation qu’une Cour d’appel retient que l’exploitation d’un « sex shop » est incompatible avec la destination de l’immeuble (2ème espèce). 

Note de M. GIVERDON :

La destination de l’immeuble est une notion « plus sentie que juridiquement précise » ; quant aux stipulations du règlement de copropriété, ce n’est qu’exceptionnellement que l’on y peut relever la définition claire et précise de l’affectation que ses rédacteurs ont entendu donner aux parties privatives. Il faut ajouter à cela la position adoptée en la matière par la Cour de Cassation qui abandonne aux juges du fond le pouvoir souverain pour apprécier si une affectation donnée est compatible ou non avec la destination de l’immeuble. Les deux arrêts ci-dessus rapportés illustrent, à la fois, l’imprécision du règlement de copropriété (21 novembre 2000) et le pouvoir souverain reconnu aux juges du fond (22 novembre 2000).

L’imprécision du règlement de copropriété, puisque l’arrêt du 21 novembre 2000 censure l’arrêt attaqué pour avoir statué par des motifs dont il ne résultait pas que l’activité de restaurant était précisément interdite par le règlement de copropriété en dérogation au principe de la liberté des activités commerciales. 

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Destination de l’immeuble appréciée d’une manière que l’on pourrait, toutes proportions gardées, qualifier de « sentimentale », en ce sens que l’arrêt attaqué avait estimé que l’exploitation d’une sex-shop était incompatible avec la destination d’un immeuble « situé en centre-ville, face à la cité administrative qui abrite à la fois la chambre départementale des notaires du Vaucluse, une librairie religieuse à l’enseigne de Clément VI, divers cabinets médicaux et un cabinet d’orthodontie qui accueille une clientèle de jeunes enfants » , alors que, comme le relevait le pourvoi (rejeté), « la destination d’un immeuble s’apprécie au regard de la destination de ses parties privatives, laquelle est définie par le règlement de copropriété ». La remarque revêt d’autant plus de poids que d’autres arrêts refusent de tenir compte du caractère du quartier « qui ne peut avoir pour effet de priver le règlement de copropriété, qui concerne un immeuble donné, du caractère conventionnel qu’il a entre tous les copropriétaires » pour justifier l’exploitation d’un « sex-shop » (CA PARIS 8 octobre 1997 ; CA PARIS 18 novembre 1998). Mais la morale est sauve…

Source : AJDI, février 2001 page 146