CASS. CIV. 3è, 16 mai 2000

La clause du contrat de bail commercial mettant à la charge du preneur tous travaux, y compris ceux visés par l’article 606 du Code Civil, est d’interprétation stricte et n’oblige pas les preneurs à la réfection totale de la toiture atteinte par la vétusté.

Note de Mme COHET-CORDEY :

Il avait déjà été jugé que la clause mettant à la charge des preneurs les réparations de toute nature, y compris celles relatives à la toiture, n’exonérait pas le bailleur de la réfection totale de cette dernière. Une telle réfection n’est pas une réparation locative ni une « grosse réparation » au sens de l’article 606 du Code Civil appliqué à la matière des baux.

Le propriétaire doit prendre en charge toutes réparations afférentes à la vétusté de l’immeuble loué ou à sa destination, tandis que le preneur n’est concerné que par celles liées à son usage et dont le contenu peut être défini par les parties. Sans clause remettant expressément en cause cette répartition des charges, le bailleur ne peut être exonéré de ces obligations.

Si le bailleur peut se décharger des grosses réparations, il ne saurait se décharger des travaux dits de réfection. Les tribunaux ne dénaturent nullement le contrat de bail contenant une clause mettant à la charge du preneur les réparations visées par l’article 606 du Code Civil en retenant une telle solution. Tout au contraire, ils évitent une telle dénaturation. Aussi les juges du fond distinguent-ils suivant l’importance des travaux mis à la charge du preneur.

A supposer que les travaux litigieux ne soient pas de ceux indispensables à l’usage du bien loué conformément à sa destination, on ne saurait pour autant les mettre à la charge du preneur dès lors qu’ils résultent de la vétusté. Faire supporter de telles charges au preneur conduirait à enrichir le bailleur dans la mesure où le bien s’en trouverait amélioré.

Ainsi, s’il est possible d’insérer au contrat une clause mettant à la charge du preneur de tels travaux, il doit en être tenu compte pour le calcul des loyers.

La portée du renvoi à l’article 606 du Code Civil par la convention des parties dans la détermination de leurs obligations de réparations est ainsi limitée. Non seulement un tel renvoi ne peut exonérer le bailleur de toutes obligations de réparation en ce qu’il reste tenu de l’obligation d’assurer au preneur la jouissance d’un immeuble en état de servir à l’usage auquel il est destiné, mais encore, il ne peut l’exonérer des travaux liés à la vétusté des lieux loués sans une disposition exprès en ce sens. A défaut, seule la perte de l’immeuble par vétusté peut permettre au bailleur d’échapper à son obligation de réfection (Code Civil, art. 1722).

Source : AJDI, 2001 n° 4 page 334