La « servitude de cour commune » créée pour satisfaire aux prescriptions des règlements ne profite pas à un fonds dominant et a un caractère perpétuel.
Note de M. Daniel SIZAIRE :
L’arrêt donnera lieu à des commentaires. Il est vrai qu’une servitude sans fonds dominant a de quoi surprendre le juriste. Mais les servitudes dont l’article L.451-1 du Code de l’Urbanisme énoncent qu’elles sont dites « de cour commune » ne sont pas à proprement parler des servitudes, tout au moins au sens de l’article 637 du Code Civil, ce que confirme évidemment l’arrêt rapporté. Certes, en pratique, elle pourra prendre la forme d’une servitude, se traduisant par des interdictions de bâtir ou de surélever affectant un fonds pour permettre de construire sur un autre fonds, mais cela afin d’assurer le respect des normes en matière de construction, le respect du droit de l’urbanisme. Objectivement il s’agit de charges imposées à une propriété par des dispositions légales qui, à défaut d’un accord amiable, seront imposées par voie judiciaire (C. Urb., art. L. 451-1), non pas pour l’utilité du fonds sur lequel les constructions seront édifiées mais, comme dit l’arrêt rapporté, « pour satisfaire aux prescriptions des règlement ». Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’on rencontre en jurisprudence cette idée que la servitude dite « de cour commune » n’a pas pour effet de servir un fonds dominant (Cass. 1ère civ., 8 mai 1963 – Cass. 3è civ., 11 déc. 1970). Toutefois cette lecture est particulièrement affirmée avec l’arrêt rapporté qui confirme un arrêt de la 23è chambre A de la CA de PARIS.
En l’espèce, les propriétaires de trois immeubles distincts s’étaient obligés envers la Ville de PARIS à aménager entre eux et à maintenir à perpétuité, dans ces immeubles, des cours et des courettes, en continuité, d’une certaine superficie, libres de toute construction. Par la suite, beaucoup plus récemment, un immeuble avait été placé sous le régime de la copropriété. Entre temps, les cours de cet immeuble avaient été bâties dès 1928. Le règlement de copropriété avait été établi en conséquence et les cours qui avaient été couvertes de constructions constituées en lots.
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Sans savoir parfaitement ce qu’il en était, puisque l’arrêt rapporté considère que la CA n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, il semble bien que la 3è chambre civile considère que la « servitude de cour commune » créée pour satisfaire aux prescriptions des règlements en matière de construction et d’urbanisme se perpétue indépendamment du statut du foncier, indépendamment des modifications pouvant affecter celui-ci et même si les différents fonds ont été réunis entre les mains d’un seul copropriétaire ce qui, s’il s’agissait d’une véritable servitude, aurait eu pour effet son extinction (C. Civ., art. 705) alors qu’en revanche elle peut se conserver s’il s’agit non plus d’une servitude mais d’une charge unilatérale grevant des terrains « à perpétuité ».
Sur le principe, si servitude dite de cour commune il y a, elle s’impose, bien entendu, au syndicat et aux copropriétaires ; le régime de la copropriété n’y déroge pas. En revanche, si on fait jouer une « cour commune » qui se perpétue à l’intérieur d’une seule et même copropriété, il y a alors une contradiction, au moins formelle, avec la jurisprudence fort contestable selon laquelle il ne peut y avoir de servitude en copropriété (Cass. 3- civ., 2 déc. 1980).