CASS. CIV. 3e, 10 décembre 2002

La location consentie par le crédit-preneur à une société commerciale inscrite au registre du commerce exploitant dans les lieux loués un fonds de commerce est un bail soumis au statut des baux commerciaux.

Note de M. Daniel SIZAIRE :

1.- L’importance de la décision n’échappera pas.

Jusqu’alors, la nature juridique de la location consentie par le crédit-preneur donnait lieu à des discussions.
Si la Cour d’appel de Versailles s’était orientée dans le sens de l’application du statut des baux commerciaux (CA Versailles, 17 juin 1997), la Cour d’appel de Colmar avait opté pour son exclusion.

2.- Au contraire, la Cour d’appel de Paul, dont l’arrêt faisait l’objet du pourvoi soumis à la 3e chambre civile, avait considéré que le bail consenti par le crédit-preneur constituait un bail commercial et avait fixé en conséquence le loyer du bail renouvelé.

Le bailleur (crédit-preneur) faisait valoir que nul ne peut transférer à autrui plus de droits qu’il n’en a lui-même ; que ni le bail à construction, ni le contrat de crédit-bail qui avait été consenti par le bénéficiaire du bail à construction, n’octroyaient les droits du régime du bail commercial et que la cour d’appel n’avait pas analysé la qualification de la sous-location par référence à la commune intention des parties.

Le pourvoi est rejeté par la 3e chambre civile au motif :

Attendu qu’ayant relevé, à bon droit, que le contrat conclu entre la société A, crédit-preneur, et la société P était un contrat distinct du contrat de crédit-bail et obéissait à des règles qui lui étaient propres, et ayant constaté que la société P était une société commerciale inscrite au registre du commerce qui exploitait dans les lieux loués un fonds de commerce, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation (au sujet de l’intention des parties) en a exactement déduit que le contrat de location consenti le 1er mars 1985 par la société crédit-preneuse était un bail soumis au statut des baux commerciaux.

3.- La position adoptée par la 3e chambre civile est claire et nette.

Le contrat de location consenti par le crédit-preneur est distinct du contrat de crédit-bail ; il obéit aux règles qui lui sont propres.

Source : CONSTRUCTION-URBANISME, février 2003 page 20