CASS. CIV. 1ère 28 Septembre 2016

Nullité du mandat de vente adressée par lettre simple faute de date certaine.

Note de Mme Corinne SAINT-ALARY HOUIN :

Une société a confié à un cabinet immobilier un mandat de vendre des locaux commerciaux, comportant une clause d’exclusivité interdisant de les céder par l’intermédiaire d’un autre mandataire.

Ce mandat a été signé par le mandant et par l’agence immobilière à des dates différentes.

Ayant été informée de la cession des locaux par l’entremise d’un autre professionnel, le titulaire du mandat exclusif a adressé à la société une mise en demeure restée sans effet et l’assigne en paiement de la clause pénale prévue au mandat.

La société a invoqué en retour la nullité du mandat.

La Cour d’appel rejette la prétention de l’agence et prononce la nullité du mandat sur le fondement de l’article 78 du décret du 20 juillet 1972 selon lequel lorsqu’un mandat est assorti d’une clause d’exclusivité, celle-ci ne peut recevoir application que si elle résulte d’une stipulation expresse du mandat dont un exemplaire a été remis au mandant.

La Cour d’appel estime que le mandat à défaut de date certaine du courrier simple, il n’était pas prouvé que l’agent immobilier l’avait remis à la poste et que la société mandante l’ait reçu avant de traiter avec le second agent.

Un pourvoi en cassation est formé par le cabinet immobilier au motif que les juges auraient inversé la charge de la preuve car il appartiendrait au vendeur d’établir la remise tardive du mandat pour justifier sa demande en nullité.

La Cour de cassation rejette ce pourvoi mais en procédant à une substitution de motifs dans les conditions de l’article 1015 du Code civil.

Elle se contente d’observer qu’en l’absence de date certaine du mandat, la formalité de l’enregistrement chronologique de cet acte, exigée par l’article 72, alinéa 4, du décret du 20 juillet 1972, n’est pas régulièrement accomplie, de sorte qu’il est nul.

Il est vrai que ce texte prévoit qu’à peine de nullité, tous les mandats reçus doivent être mentionnés par ordre chronologique sur un registre des mandats. Ce dernier est à l’avance coté sans discontinuité et relié.

Encore faut-il que les mandats le soient à la bonne date. Or, elle n’était pas certaine dans le cas présent.

Le débat est ainsi déplacé de la date du contrat entre absents au respect du formalisme du mandat de l’agent immobilier qui entraine toujours la nullité du mandat.

L’intermédiaire est privé de sa rémunération et de toute indemnisation pour n’avoir pu prouver que le formalisme rigoureux de la loi Hoguet avait été respecté.

Source : Dict. perm. Gestion im., bull. 495, page 9