En cas de perte d’une chose ayant fait l’objet d’un prêt à usage ou commodat, l’emprunteur ne peut s’exonérer qu’en rapportant la preuve de l’absence de faute de sa part ou d’un cas fortuit.
Note de M. Laurent LEVENEUR :
Le propriétaire d’un local le prête à une association.
Voici qu’un jour un incendie se déclare et ravage le local.
Quelle en est la cause ?
Nul ne le saura jamais avec certitude.
Dès lors, qui doit supporter les conséquences de ce sinistre, le propriétaire ou l’association emprunteuse ?
Les textes que le Code civil consacre au commodat ne donnent pas expressément la réponse, ce qui favorise les procès.
C’est ce qui se passe ici : le prêteur intente contre le cocontractant une action en indemnisation de son préjudice.
Dans ce procès, une expertise relève bien parmi les différentes hypothèses émises pour tenter d’expliquer l’origine du sinistre, le fait que des appareils aient été laissés en permanence sous tension, ainsi que la présence de fumeurs.
Mais la Cour d’appel considère que ni l’un ni l’autre de ces faits ne sont fautifs, et c’est pourquoi elle rejette la demande du prêteur.
Mais depuis plusieurs années, la Cour de cassation décide que la perte de la chose prêtée suffit à engager la responsabilité de l’emprunteur, sauf à ce que celui-ci s’exonère en rapportant la preuve d’un cas fortuit ou de l’absence de faute de sa part, et c’est ce qu’elle rappelle dans cette décision.
Cette jurisprudence fait ainsi, de l’obligation de conservation de l’emprunteur une obligation intermédiaire entre une obligation de moyens et une obligation de résultat, ce qu’on peut appeler une « obligation de moyens renforcée ou de résultat atténuée« .
La situation de l’emprunteur est meilleure que s’il était chargé d’une obligation de résultat, parce qu’il peut s’exonérer non seulement de la preuve d’un cas fortuit mais aussi par celle de l’absence de faute de sa part, en revanche elle est moins bonne que s’il était chargé d’une obligation de moyens, puisque c’est sur lui que pèse la charge de la preuve de l’absence de faute.
Ainsi, le risque du doute, lorsque la cause de la perte de la chose reste inconnue, pèse sur lui.
Face à ce risque, l’assurance est une bonne précaution, que l’association emprunteuse n’avait pas négligé de prendre en l’espèce.