CASS. CIV. 1ère 25 Février 2009

La Cour de cassation vient de préciser la jurisprudence du Conseil d’Etat, d’après laquelle domaine public et copropriété sont incompatibles.

Note de M. Philippe YOLKA :

Il existe une incompatibilité de principe entre domanialité publique et copropriété, que le Code général de la propriété des personnes publiques a laissée intacte.

Le Conseil d’État avait considéré voici une quinzaine d’années que la loi du 10 juillet 1965 repousse la domanialité publique (ainsi que la qualification d’ouvrage public), les biens des personnes publiques soumis à la copropriété figurant nécessairement dans leur domaine privé (CE, 11 févr. 1994).

Cette position a constamment été réaffirmée depuis lors, tant par les juridictions administratives du fond (CAA Douai, 8 juill. 2003 – CAA Nancy, 2 mars 2000 – CAA Bordeaux, 2 mai 1995) que par la doctrine administrative dans diverses réponses ministérielles.

Jusqu’à présent, le juge judiciaire n’avait guère eu l’occasion de reprendre la jurisprudence administrative à son compte

De la décision du Conseil d’Etat du 11 février 1994, il ressortait qu’un bien immobilier soumis à la copropriété appartient au domaine privé ; mais une telle solution n’avait pas été clairement circonscrite à la situation dans laquelle la copropriété préexiste.

La Cour de cassation apporte une précision d’importance, en considérant dans l’arrêt du 25 février 2009 qu’un règlement de copropriété ne saurait soustraire au domaine public un ouvrage public (en l’occurrence, les portiques d’un immeuble vendu par la commune dans les années 1880 et ultérieurement divisé en lots, dont le cahier des charges de l’adjudication avait précisé qu’ils demeuraient dans le domaine public) antérieur à la copropriété.

Imagine-t-on les conséquences d’une solution contraire ?

La soumission d’un bien du domaine public à la copropriété signerait la disparition automatique de la domanialité publique, sans désaffectation ni déclassement !

Autrement dit, un acte de droit privé – le règlement de copropriété – l’emporterait sur une disposition de rang législatif (l’article L. 2141-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, qui pose la nécessité d’un déclassement préalable à la sortie des biens du domaine public).

On peut en tirer cette conclusion qu’il existe des cas dans lesquels seule la technique de la division en volumes permet d’organiser convenablement les relations au sein des « ouvrages complexes« .

Source : JCP éd. Adm. et coll. terr., 14/09, 2080