Le juge peut, dans le cas où il prononce la déchéance du droit aux intérêts, décider que les sommes payées par l’emprunteur au titre des intérêts seront imputées sur le capital.
Note de M. Guy RAYMOND :
Deux époux contractent un prêt immobilier garanti par une hypothèque.
Ils cessent tout remboursement puis invoquent la nullité du contrat et subsidiairement la déchéance du droit aux intérêts.
La Cour d’appel rejette leur demande principale mais accueille leur demande subsidiaire, en décidant que les sommes, perçues indûment par l’organisme de crédit au titre des intérêts, seraient imputées sur le capital.
La Cour de cassation a décidé que l’article 1906 ne s’applique pas lorsque les intérêts ont été perçus illégalement.
Elle a ainsi jugé (Cass. com., 9 avr. 1991) : « ce texte (C. civ., art. 1906) ne s’oppose cependant pas à la répétition de la partie des intérêts illégalement perçue au regard de l’article 1907 du Code civil et de l’article 4 de la loi du 28 décembre 1966 » (dans le même sens, Cass. com., 13 déc. 1994).
Or, dans cette affaire, si la déchéance du droit aux intérêts est prononcée, c’est que les intérêts ont été illégalement perçus. La Cour de cassation est toujours fidèle à son interprétation de l’article 1906.
Mais cet arrêt présente un autre intérêt : celui de préciser la nature juridique de la déchéance du droit aux intérêts et dans le même temps le champ d’application des articles 1254 et 1906 du Code civil.
La déchéance du droit aux intérêts ne constitue pas un paiement.
La déchéance du droit aux intérêts est une sanction, une peine civile à l’encontre du prêteur qui ne s’est pas conformé aux exigences légales en matière de crédit accordé à un consommateur.
Or, tant dans l’article 1254 que dans l’article 1906, la notion de paiement apparaît.
La Cour de cassation fait de ce paiement la condition d’application de ces deux articles.
Les juges du fond disposent donc d’une double faculté lorsqu’ils prononcent la déchéance : d’abord celle de décider que la déchéance sera totale ou partielle, d’autre part celle de décider que l’imputation se fera sur le capital dû par l’emprunteur.