L’assureur de dommages doit-il garantir un sinistre de nature décennale, certes survenu tandis que les dix ans prévus par l’article 2270 du Code civil n’étaient pas expirés, mais déclaré à cet assureur seulement après les dix ans fatidiques ? Une cour d’appel avait, en cette hypothèse, estimé tardif le recours de l’assuré et donc son action irrecevable. Sa décision a été cassée, par application d’un motif de principe qu’il convient de reproduire in extenso : « Attendu que la prescription prévue par le premier de ces textes (l’article 2270 C. Civ.) est sans application au délai ouvert à l’assuré pour déclarer les sinistres couverts par le contrat d’assurance dommages-ouvrage régi par le troisième (art. L.242-1 C. Ass.) ; qu’en vertu du deuxième (art. L.114-1 C. Ass.), l’assuré dispose, pour réclamer l’exécution des garanties souscrites, d’un délai de deux ans à compter de la connaissance qu’il a des désordres survenus dans les dix ans qui ont suivi la réception des travaux ».
Note de M. Georges DURRY :
Il résulte de cet attendu, d’abord, une solution explicite, qui repose, en second lieu, sur une réponse implicite, à une question que l’on pouvait se poser, et qui, enfin, oblige à se demander ce qu’il advient du recours de l’assureur de dommages contre l’assureur de responsabilité.
Ce que l’on sait maintenant avec certitude, c’est que l’assureur dommages-ouvrage n’est plus à l’abri d’un recours de son assuré par la seule expiration du délai de dix ans postérieur à la réception. Dès lors que le désordre s’est produit, lui, pendant cette décennie, l’assuré dispose encore de deux ans pour agir contre son assureur. Et l’arrêt précise que ce délai de deux ans court, non pas du jour de la survenance du dommage, mais bien de celui où l’assuré a pu en avoir connaissance. Si donc l’on suppose un dommage décennal se produisant à la toute fin des dix ans, et un assuré longuement absent de chez lui, c’est bien après même 12 ans que l’assureur est exposé un recours.
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La solution a de quoi surprendre ; elle s’imposait cependant. Nulle part, ni dans la loi, ni dans les clauses-types, il n’est indiqué que toute action contre l’assureur dommages-ouvrage est éteinte dix ans après la réception. En réalité, la cour d’appel, dont la décision est censurée, avait confondu deux questions différentes, que la cour de cassation distingue à juste titre : la durée de la période de garantie, d’un côté, et celle de la faculté d’agir contre l’assureur, de l’autre. Et ce n’est pas parce que la première, durant laquelle doit se produire le risque garanti, a pris fin qu’il en va de même de la seconde.